Jean-Yves Pons. Aspects héraldiques et sigillographiques des conséquences possibles de l’ascendance davidique des rois de France (Partie 2).

       Rappel. La premiére partie de cette analyse   a été publiée  sous l’intitulé suivant:                https://charte-fontevrault-providentialisme.fr/index.php/2023/02/08/jean-yves-pons-aspects-heraldiques-et-sigillographiques-des-consequences-possibles-de-lascendance-davidique-des-rois-de-france-partie-1

En voici maintenant la deuxième partie

   NDLRB.  Vous trouverez    sur un article immédiatement  à venir  les illustrations des lignes ci-dessous  ,illustrations  référencées  grâce à un numéro en gras comme dans l’exemple qui suit : Lara (de gueules à deux chaudrons gringolés) -2-

       Passons maintenant en revue les armoiries des principales familles qui ont été évoquées, telles qu’elles sont apparues à partir du milieu du XII ème siècle et dont Catoneo nous a retissé les liens ici :                                                                                       https://charte-fontevrault-providentialisme.fr/index.php/2023/01/31/contribution-decisive-a-letude-de-lascendance-davidique-des-rois-de-france/

       Les vicomtes de Narbonne, nés dans l’orbite des Guilhelmides et après quelques épisodes mal connus de vicedomini puis de vicecomiti, exécuteurs des actes et sentences des premiers comtes carolingiens de Gothie, portèrent un écu de gueules plain (entièrement rouge, sans partition ni meuble, comme les Albret sans que nous connaissions de liens entre les deux familles au XII ème siècle). Mais rappelons qu’à cette époque les descendants guilhelmides s’étaient déjà répandus dans les autres maisons et la succession avait été assurée par la famille de Lara par le mariage d’Ermessinde, la soeur de la dernière vicomtesse de Narbonne, Ermengarde, avec le Castillan Manrique de Lara, seigneur de Molina, qui reprit et conserva l’écu de gueules plain en abandonnant celui de Lara (de gueules à deux chaudrons gringolés) –2– Un champ que l’on retrouvera ensuite partout ou presque.

      Les seigneurs de Montpellier, dont nous parlions plus haut, très tôt et étroitement liés à la bourgeoisie de la ville et, en particulier, à la riche communauté davidique qui assura le développement économique, commercial mais aussi culturel de cette cité, portaient à partir de Guilhem VI ou Guilhem VII un écu d’argent (blanc) chargé d’un tourteau (cercle) de gueules (rouge) –3- qui semble avoir fait lien avec ceux de Narbonne par le système des brisures.

          Mais, c’est là aussi qu’apparaît une première évocation du lien davidique. Sur les sceaux de ces seigneurs (en tout cas de Ghilhem VI à Guilhem VIII) l’avers figurait un joueur de harpe -3bis-, à la façon du roi David. Or l’évocation strictement musicale n’apparaît dans aucun texte, même si d’aucuns relient Guilhem VIII à la poésie et à la musique de plusieurs trouvères occitan. Et la harpe reste un instrument très rare en héraldique comme en sigillographie. Nous pourrions donc peut-être y voir non seulement le rappel des guilhelmides mais aussi des liens avec la communauté juive de Montpellier… ou d’ailleurs en Septimanie.

      Les comtes de Toulouse de la souche raimondine, liés à toutes les grandes familles du sud du pays, originaire autant qu’issue, portaient le fameux écu de gueules à la croix dite de Toulouse, vidée, cléchée et pommetée d’or et dont on ne connaît ni réellement ni avec certitude la source ou la signification (4).

        Les premiers comtes de Rouergue étaient antérieurs à l’usage des armoiries et les derniers rejetons sont retournés du côté des Narbonne tandis qu’une autre branche à donné naissance aux Comborn (5) et, donc, aux quatre principales Les premiers comtes de Rouergue étaient antérieurs à l’usage des armoiries et les derniers rejetons sont retournés du côté des Narbonne tandis qu’une autre branche à donné naissance aux Comborn (5) et, donc, aux quatre principales vicomtés du Limousin (Turenne -6-, Ventadour –7- et Limoges –8-) chères à notre ami Alain Texier (https://charte-fontevrault-providentialisme.fr/index.php/2023/01/05/alain-texier-1945-20-une-vie-de-royaliste-22-armoiries-da-texier-cja-dessinees-et-blasonnees-par-jean-yves-pons-cer/)

       Les vicomtes de Millau (et de Gevaudan), issus des comtes de Rouergue raimondins mais très liés aussi aux vicomtes de Narbonne comme aux comtes de Barcelone, s’éteignirent avec la dernière vicomtesse, épouse du Raymond-Béranger, comte de Barcelone et de Provence, au moment de l’apparition des premières armoiries. Dès lors, ce furent les armes de ce dernier qui furent portées : d’or à quatre pals de gueules (10).

     Mais c’est aussi de cette époque que datent les armoiries du comté de Rodez, au détour d’un curieux clin d’oeil de l’Histoire qui va nous replonger dans nos réflexions précédentes à propos des Guilhelmides et de leurs liens davidiques. La vicomté de Rodez était partie intégrante du comté de Rouergue jusqu’à Raymond de Saint-Gilles, frère cadet de Guillaume IV comte de Toulouse et, à ce titre, comte de Rouergue. En 1096, avant de partir en Terre-Sainte pour la première croisade et afin de se procurer quelques moyens financiers, Raymond de Saint-Gilles céda en gage cette vicomté de Rodez à son vicomte qui n’était autre que Richard III de Millau-Gévaudan (qui possédait aussi les puissantes vicomtés de Lodève et de Carlat par mariage). Cette acquisition ne fut conclue qu’en 1112 par l’accord définitif entre Alphonse Jourdain, devenu comte de Toulouse, et Richard III de Millau-Gévaudan qui prit alors le titre de comte de Rodez. Mais, les premières armoiries n’étant apparues que quelques décennies plus tard, il ne fut pas le premier porteur des armes de Rodez. Ce fut sont fils, Hugues Ier, qui fut l’inventeur des armoiries du comté de Rodez : de gueules au léopard lionné d’or (11). Celles-ci furent dès lors portées par tous ses successeurs jusqu’à l’arrivée des Armagnac à la tête du comté, à la mort de la dernière comtesse, en 1313.

Hugues Ier eut plusieurs enfants dont deux lui succédèrent à la tête du comté de Rodez tandis que le troisième devint évêque de Rodez. Mais son quatrième fils, né en 1140, étrangement prénommé Bernard et rappelant ainsi pour la première fois nombre de Guilhelmides de Septimanie, reçut en biens deux territoires du Gévaudan : Calmont-Plancatge et Arpajon, situées sur le Causse Méjean. Il retint le second comme nom d’usage et fut ainsi à l’origine de l’illustre maison d’Arpajon qui finit érigée en duché-paierie par le roi Louis XIV (https://fr.wikipedia.org/wiki/Maison_d%27Arpajon).

      Mais l’étrangeté de cette histoire ne s’arrête pas là ! En effet, ce Bernard de Rodez , non seulement prit le nom d’Arpajon mais ne releva pas les armes de son père. Il conserva (ou on conserva pour lui) le champ de gueules mais remplaça le léopard lionné par… une harpe ! (12) Pourquoi Bernard demandions-nous mais, plus troublant encore, pourquoi une harpe sur ses armoiries, bien rare dans la région et à la symbolique bien mystérieuse en Rouergue, sinon pour rappeler un fait particulier, digne d’être durablement exprimé ? Et pourquoi pas, alors, une ascendance davidique ? Comme le feront peut-être aussi, à la même période, les trois Guilhem de Montpellier que nous citions plus haut.

     A ces quelques familles importantes et hautement significatives nous pourrions en ajouter quelques autres comme par exemple les comtes d’Auvergne, tant liés à tous ceux qui précèdent et dont les premières armoiries (avant le fameux gonfanon aux couleurs inversées) fut de gueules à la bande d’or (13). Ou encore, pourquoi pas, histoire de terminer notre exposé par un nouveau clin d’oeil… les rois d’Angleterre, dont vous n’ignorez pas qu’ils furent ducs d’Aquitaine mais aussi de Normandie et comtes de Poitiers, dont on dit qu’ils sont aussi d’ascendance davidique et qui firent usages (et le font encore) de lions ou de léopards d’or sur champ de gueules. Pourtant, il ne faut pas se méprendre, la harpe d’or cordée d’argent sur champ d’azur du troisième quartier des armoiries du Royaume-Uni actuel, lui vient des anciens rois d’Irlande ! (14)

Mais ceci est une autre histoire.

Pour le CER et la Charte de Fontevrault, Jean-Yves Pons, CJA.

3 thoughts on “Jean-Yves Pons. Aspects héraldiques et sigillographiques des conséquences possibles de l’ascendance davidique des rois de France (Partie 2).

  1. Catoneo

    L’origine de la harpe d’Arpajon n’a pas été explorée parce qu’on qualifia le blason d’armes parlantes. Mais s’il existe une intention du premier comte à meubler ses armes d’une harpe significative, on est en droit de s’interroger sur son origine davidique. L’instrument connu chez la plupart des nations depuis la haute antiquité fut un médium de communication avec les dieux ou d’accompagnement d’office religieux. Le comte aurait-il été si prétentieux qu’il s’arrogeât le « droit » de prendre une harpe sur ses armes ?
    La harpe n’était pas non plus un instrument de musique profane utilisé dans l’espace des troubadours occitans (on en compte neuf, tous venus d’Andalousie*, dont un seul à cordes multiples verticales, la lyre symétrique) et l’on sait que bien des nobles taquinèrent la muse parfois avec succès. Mais sans doute aussi, la harpe avec sa caisse de résonnance était-elle encombrante et « intransportable » à dos de cheval.

    On peut dés lors raisonnablement penser que le premier Arpajon à signifier dans ses armes quelque chose de plus « grand », sans pour autant être prétentieux ou se prêter à la raillerie très facile de ses sujets en ces temps de liberté, voulut affirmer quelque chose. Du moins est-il impossible de contredire cette hypothèse.

    Note*: Troubadours : https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1966_num_21_5_421446 page 1002 et s.

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  2. Conseil dans l'Espérance du Roi

    L’hypothèse des armes parlantes pour Bernard d’Arpajon est logique mais peut-être un peu courte si l’on se contente de jouer sur les mots. Si j’ose dire… il est facile de tomber dans le panneau avec un nom aussi évocateur. C’est bien ce qui interpelle dans cette affaire, surtout si on y ajoute une considération onomastique : il est le premier Bernard de sa famille et rappelle donc au plus haut point quelques antécesseurs guilhelmides.
    Et n’oublions non plus qu’à quelques années près, deux ou trois Guilhem de Montpellier se firent représenter avec une harpe sur leur sceau. Simple hasard ?

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