J’ai parfois été confronté au fait que les « pro-Louis XX » ou les orléanistes avaient tendance à relayer l’argument suivant : la position providentialiste est dénoncée par une vive critique de Saint Thomas d’Aquin sur la notion même providentialisme, qui s’apparente au surnaturalisme, condamnée par l’Église. Or, il parait évident que ce que Saint Thomas d’Aquin dénonce, c’est le fait de laisser au final la providence agir sans se servir de l’instrument qu’est le catholique, autrement dit, l’homme se laisse porté sans jamais faire aucun de ses devoirs qui lui sont demandés par la providence ( Quiétisme) . Il va de soit que ce n’est pas là le but de l’école du royalisme providentialiste, qui défend, pour faire simple, la « personne morale » que représente le Roi, laissant le pouvoir de trancher à Dieu sur le choix de la personne qui sera son lieutenant. Il s’agit donc d’expliquer que le royalisme providentialiste ne fait donc tomber ni dans le surnaturalisme, ni dans l’activisme (lui aussi dénoncé par l’Eglise).
De façon moins intellectualisée, si j’ose ainsi m’exprimer, nous sommes privés de roi depuis au moins le 10 août 1792. C’est donc bien la preuve que nos finesses humaines ne suffisent pas à nous rendre le roi. Mettons nous donc sérieusement à son écoute et évitons de prier le « Notre Père » en Lui disant : « Que Votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel sauf pour le trône où là ce sera ma volonté qui sera faite et non la Vôtre! «
A.T
Exactement, et ceci vaut pour les militant des Bourbons, si Dieu a permis qu’ils soient hors du Trône, c’est bien qu’il y a une raison, donc en attendant, il s’agit de faire l’apologie de la nécessité naturelle et surnaturelle du Royaume des Francs Catholiques sans s’arroger le poste de « directeur des ressources humaines » du Bon Dieu. Je tâcherai à l’occasion de développer cette question du faux argumentaire des naturalistes étiqueté « Orléans » ou « Bourbon » vis à vis de l’objection Thomiste qu’ils font et qui est mal à propos sur la notion de providentialisme en terme de choix. La guerre pour un principe n’est pas nécessairement la guerre pour une personne, surtout quand Dieu nous signifie clairement que pour le moment, personne ne l’incarne.
Depuis la mort du Comte de Chambord sans enfants, le Royalisme est incarné par les Orléanistes qui défendent le caractère exclusivement Français de la descendance de Louis-Philippe et les Légitimistes qui s’opposent à l’orientation laïc des premiers et mettent l’accent sur le caractère Catholique des Bourbons d’Espagne, et les Survivantistes croyant en une descendance de Louis XVII.
Mais il existe aussi des Royalistes qui ne se reconnaissent ni en la dérive laïcisante de l’Orléanisme ni en le sentimentalisme parfois exacerbé du Légitimisme comme du Survivantisme et qui s’en remettent à la providence pour le choix d’un Roi Français comme Catholique: on les appelle pour cela Providentialistes.
Le père du Providentialisme est Joseph de Maistre: http://agora.qc.ca/dossiers/Joseph_de_Maistre
» Seul Dieu fait les Rois. Il prépare Seul les Races Royale: il n’y a pas de plus grande Légitimité (Considérations sur la France) ! ».
Il disait également: » Les nations, comme les individus, ont une mission: celle de la France est de faire triompher l’Eglise et la Royauté du Christ (Considération sur la France) ! ».
Les Royalistes sont souvent des gens qui croient, selon l’expression de Barbey, au « triomphe naturel du mal sur le bien et (au) triomphe surnaturel de Dieu sur le mal ». D’où leur Providentialisme, où « tout est concrètement surnaturel », selon la phrase de Mrg Pie. Le Providentialisme semble naitre avec le Comte de Chambord. Le Providentialisme du plus grand nombre des Légitimistes, surtout dans les dernières années de la vie du Comte de Chambord, est absolu, volontiers catastrophiste et parfois générateur d’espérence.
Absolu, ce Providentialisme l’est dans la mesure où il constitue la grille quasi-exclusive à l’aide de laquelle les Royalistes décryptent l’histoire. Tout est signe. Tout est sens. La chute de Thiers, dans laquelle le P. Morel du Monde voyait « le doigt de Dieu », est interprétée de la même façon. Le 12 août 1873, la Gazette du Dauphiné, reliant le vote par l’Assemblée nationale le 24 juillet d’une loi déclarant d’utilité publique la construction de la basilique du Sacré-Cœur et la visite du comte de Paris à Frohsdorf, concluait :
-Le Christ a immédiatement payé les hommages rendus au Sacré-Cœur !
Un dernier exemple parmi cent autres : il ressort de la correspondance de Joseph de La Bouillerie, étudiée par M. Levillain, que ce député « chevau-léger » avait le sentiment
-de ne rien devoir au suffrage universel qui l’avait porté à l’Assemblée. Le suffrage universel n’était à ses yeux que le véhicule de la Providence qui l’avait investi comme député et lui avait, donné une mission : la restauration Monarchique.
Le comte de Chambord ne se distinguait pas le moins du monde de ses troupes de ce point de vue:
1. Parlant de ses droits au lendemain du décès de Louis XIX, il affirme qu’il ne veut « les exercer que lorsque, dans (sa) conviction, la Providence (l’) appellera à être véritablement utile à la France ».
2. Dans son manifeste du 25 octobre 1852, il parle du « dépôt de la monarchie héréditaire dont la Providence (lui) a confié la garde ».
3. Dans une lettre à Nemours du 5 février 1857, il définit son retour comme « le moment où la Providence (lui) en imposerait le devoir ».
4. Dans sa lettre du 8 mai 1871 à Carayon-Latour, il affirme noblement :
-La parole est à la France et l’heure est à Dieu.
5. Enfin, dans sa fameuse lettre à Dupanloup du 8 février 1873, il pose avec netteté sa règle de comportement :
-J’attends peu de l’habileté des hommes et beaucoup de la justice de Dieu.
Pour les Providentialistes, l’Ascendance Davidique des Rois de France explique le caractère Sacré et Divin de la Royauté en France et nous donne l’assurance du salut de la France par une future Restauration: celle d’un Grand Monarque annoncé et prophétisé (il y existe une prophétie disant que le Grand Monarque sera Roi de France et d’Italie: cette hypothèse n’a rien d’absurde, vu que les Bourbons ont régné sur le Duché de Parme comme sur le Royaume de Naples). Car il n’y a pas de Mission Divine de la France sans continuité Royale. D’où le culte du Christ-Roi et de Son Sacré-Coeur, Seul vrai Roi de France.
Si le principe du Royalisme Légitimiste est qu’il ne peut y avoir de Mission Divine de la France sans continuité Royale, le principe du Royalisme Providentialiste est que si c’est Dieu Seul qui fait les Rois, toute querelle dynastique est inutile: le vrai Providentialiste portera, dans l’attente de la Restauration, respect, sympathie et affection à tous les descendants actuels de nos Rois.
PRIONS POUR NOS PRINCES!
Hervé J. VOLTO, CJA
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