Cinq jolies formules pour dire que l’on part en vacances
«En voiture Simone», «partir en goguette»… Le Figaro vous propose de (re)découvrir ces charmantes expressions françaises.
Par Maguelonne de Gestas
Publié le 09/02/2021 à 07:00
Vacances… Quitter son quotidien, la grisaille et la morosité ambiante pour d’autres contrées. Une poignée de Français (Bisontins, Clermontois, Bordelais, Poitevins,…) goûtent en ce moment même au temps béni du repos. Bagages pliés, jouets rassemblés, manteaux, écharpes et bonnets empaquetés, ils ont pris la clé des champs, sous l’œil envieux de leurs voisins, furibonds de ne pas avoir de progéniture à divertir. Nécessité fait souvent loi… La rédaction revient à cette occasion sur l’origine de nos expressions du voyage.
Partir en goguette
Le mot est festif! La «goguette» est avant tout un «propos joyeux, une plaisanterie» . En ancien français, la «gogue» était aussi une «raillerie». Son origine est insolite: le mot serait né d’après l’onomatopée «gog» («qui exprimerait la joie»), proche de «kok» et de «gag» (diminutif de «gaga»). «Être en goguette» signifie aussi «être de bonne humeur, sous l’effet du vin et de la bonne chère.» À l’inverse, «chanter goguette à quelqu’un» n’est guère agréable. La pauvre âme visée par telle musique se voit «dire des injures, des choses offensantes, fâcheuses», précise le thésaurus.
Tirer ses grègues
Si un beau jour, vous plaquez tout au beau milieu de la nuit, un enfant sous un bras, vos valises sous l’autre, nul doute: vous «tirez vos grègues»! Cette formule vieillie et populaire est synonyme de «s’enfuir», les grègues étant un genre de chaussettes, ou chausses, «allant à mi-cuisse, légèrement rembourrées», que portaient nos ancêtres. Les «gregues» (ou «greguesques») étaient proprement des «chausses à la grecque, comme il y en avait alors à l’italienne, à la napolitaine, etc», souligne le Littré. Ce nom est issu du provençal «grégo(a)», qui signifie «grec». C’est dans la fable Le Coq et le Renard que l’on trouve pour la première fois cette expression.
Filer à l’anglaise
Voilà une formule héritée de l’animosité légendaire avec nos voisins d’Outre-Manche. Notons que les Anglais eux-mêmes disent «to take french leave» pour signifier «filer, s’en aller, s’esquiver» . Elle serait apparue en français au XXe siècle, et rappelle les guerres interminables qui déchirèrent nos deux pays pendant des siècles. Nous avons aussi le cocasse «pisser à l’anglaise», dont le sens n’est pas très éloigné, puisqu’il signifie «disparaître (sous prétexte d’un besoin naturel à satisfaire) et ne pas revenir», lit-on dans le Trésor de la langue française.
En voiture Simone
Simone Pinet de Borde des Forest se doutait-elle que son prénom resterait gravé dans le marbre des expressions françaises? La jeune fille passa son permis de conduire en 1929 à l’âge de 19 ans, et fut pionnière des courses automobiles, réservées à la gent masculine, jusqu’en 1957. Il faut attendre 1962 pour que la formule se popularise. Nous la devons au présentateur Guy Lux, créateur de l’émission à succès Intervilles. Une jeune femme, Simone Garnier, participe à ce rallye automobile. C’est de son ton empreint d’humour bravache qu’il lui lance, en référence au succès de sa devancière «le cri de guerre ‘en voiture Simone!’», précise Georges Planelles dans Les 1001 expressions préférées des Français.
La postérité n’a gardé que la première partie de la phrase, qui était en réalité: «En voiture Simone, c’est moi qui conduis, c’est toi qui klaxonnes!»
Prendre la clé des champs
La route zigzague devant vous, le moteur ronfle, tout est calme aux alentours, vous n’entendez que le gazouillis des oiseaux, le vent caresse agréablement votre joue. C’est le premier jour des vacances, vous prenez (enfin!) la clé des champs. Cette clé, c’est celle que l’on promettait aux prisonniers au moment de leur libération, pour rejoindre leur champ. Dans le langage courant, ce dernier désigne au sens large un «espace d’une certaine étendue et plus ou moins nettement délimité sur lequel se déroule une activité connue» . «Prendre la clé des champs» est bien synonyme de liberté, d’évasion vers cet endroit, rural ou campagnard, où l’on se sent vraiment chez soi.
https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/expressions-francaises/cinq-jolies-formules-pour-dire-que-l-on-part-en-vacances-20210209