Jeanne d’Arc en dix idées reçues via le site « ça m’intéresse ».

  1. Son histoire commence quand elle entend des voix

VRAI. Elle affirme que ces voix mystérieuses lui parviennent pour la première fois dans le jardin de son père, à l’âge de 13 ans environ, vers 1425. Les premières qu’elle entend sont celles de deux saintes, Catherine et Marguerite – elles lui ont décliné leur identité. Une troisième voix lui « parle » ensuite. C’est saint Michel. Il lui ordonne de sauver le royaume de France, dont il est le saint protecteur.
En ce Moyen Âge très religieux, évoquer ce genre d’intervention surnaturelle n’a rien de délirant. Quand elle raconte ces manifestations sonores à ses proches, Jeanne ne passe pas pour une folle. Elle se construit au contraire la réputation d’une messagère divine. Et elle rencontre d’autant plus d’attention – dans sa Lorraine natale, puis jusqu’à la cour du roi – que la France vit des heures d’incertitude. Depuis le traité de Troyes de 1420, Charles VII, établi à Bourges, ne règne en réalité que sur un territoire couvrant la partie de notre pays actuel située au-dessous de la Loire. Le roi d’Angleterre, Henri VI et ses alliés de la province bourguignonne dominent de leur côté toute la moitié nord, mais aussi le duché d’Aquitaine.
En 1428, les Anglais se lancent à l’assaut de la ville d’Orléans, place forte essentielle de Charles VII sur la Loire. C’est alors que ce dernier entend parler, par un seigneur lorrain dénommé Robert de Baudricourt, d’une jeune illuminée qui prétend avoir mission de sauver son royaume. Il la reçoit et, convaincu de son inspiration divine, décide de l’envoyer à Orléans, en mars 1429, soutenir les soldats français assiégés.

  1. C’était une bergère qui gardait ses moutons

FAUX. Née vers 1412, Jeanne est issue d’une famille de laboureurs aisés – son père a officié dans son village comme doyen, ce qui équivaut au statut de maire. Le mythe de la pauvre petite bergère est propagé par les partisans de Charles VII, entre mars et juin 1429, afin d’accroître la popularité de Jeanne. Dans les Évangiles, Jésus se compare à un berger. Qualifier la jeune fille de bergère, c’est souligner la dimension divine de sa mission aux côtés du souverain français.

  1. Son engagement a changé le cours de la guerre

VRAI. « Elle a fait ce que 100 000 hommes n’eussent pu faire », écrit sa contemporaine, la poétesse Christine de Pisan. Son entrée dans Orléans le 29 avril 1429 galvanise les soldats, assiégés depuis octobre 1428, même si ce n’est pas elle – contrairement à ce que l’on croit souvent – qui y mène les troupes mais Jean Dunois, le cousin du roi. Et son apparition correspond au retournement de fortune dans l’affrontement entre Français et Anglais, soutenus par les Bourguignons. Avec Jeanne dans leurs rangs, les soldats français délivrent Orléans. Puis, entre mai et juin, ils reprennent d’autres villes : Jargeau, Meung, Beaugency, Patay. Elle peut alors se consacrer à la deuxième partie de sa mission, dictée là encore par les voix : faire sacrer Charles à Reims. Cette cérémonie, qui n’a rien d’indispensable – car Charles est roi de par sa naissance – a cependant une valeur symbolique cruciale, que la jeune fille a pressentie, car elle inscrit le souverain dans la lignée de Clovis. Le 17 juillet 1429, lorsqu’il est sacré roi dans la cathédrale de Reims, Charles reçoit ainsi sur le front l’huile même qui a servi à baptiser Clovis à la fin du Ve siècle. Et Jeanne, bien sûr, assiste à cet événement, qui est son œuvre.

  1. Ce sont les anglais qui l’ont capturée

FAUX. Ce sont les Bourguignons, alliés des Anglais contre le roi de France, qui l’ont arrêtée en mai 1430, à Compiègne, ville assiégée qu’elle cherche alors à délivrer. Pour 10 000 livres, ils vendent leur précieuse otage aux Anglais, qui la maintiennent prisonnière à Rouen, où ils ont installé leur état-major.

  1. Jeanne d’Arc a été trahie par Charles VII

DIFFICILE À DIRE. Certains historiens ont prétendu que le roi aurait pu être tenté d’échanger Jeanne, durant les premiers mois de sa détention, contre une rançon ou contre des prisonniers anglais. Sa mise à l’écart lui rendait-elle service ? « Peut-être son charisme lui faisait-il de l’ombre, à lui, l’autre élu de Dieu ? écrit l’historienne Colette Beaune. Il voulait de toute façon changer de politique, négocier avec la Bourgogne, ce à quoi Jeanne s’opposait… » En revanche, il pensait certainement avoir le temps de négocier. Mais en janvier 1431, les Anglais décident de poursuivre Jeanne pour hérésie – pour la discréditer, elle, mais aussi Charles VII par ricochet. Ce dernier est alors pris de court : il ne peut plus rien pour elle, l’accusation est trop grave.

  1. Durant toutes ses batailles, elle portait un habit d’homme

VRAI. Et cette tenue, considérée comme immorale, lui est tout particulièrement reprochée par ses juges, à Rouen, lors de son procès qui va durer plusieurs mois. Elle a abandonné, explique l’acte d’accusation, « toute décence et convenance de son sexe, usurpant impudemment un habit difforme et l’état d’homme d’armes ». En fait, c’est au tout début de sa mission, lorsqu’elle rejoint Charles à Chinon, que Jeanne troque sa robe rouge pour des vêtements d’homme. Elle taille aussi, à ce moment-là, ses cheveux noirs en rond, suivant la mode masculine : elle assume ce travestissement car elle doit évoluer désormais dans un monde de soldats et ne peut les guider sous l’apparence d’une femme. Le 23 mai 1431, à la fin de son procès, Jeanne se voit ordonner par les juges de renier ses voix et d’arrêter de s’habiller en homme. À ces deux conditions, elle échappera à la mort. Elle accepte, sans doute par peur. Mais quelques jours plus tard, elle est surprise dans sa cellule vêtue à nouveau en homme et définitivement condamnée au bûcher. Pourquoi a-t-elle recommencé à porter ces habits masculins la mettant en danger ? Peut-être les Anglais ont-ils subtilisé sa robe. Elle n’aurait alors eu d’autre choix que d’enfiler les seuls vêtements à sa disposition dans sa cellule…

  1. Jeanne d’Arc aurait eu de nombreux amants

FAUX. Cela fait partie des calomnies véhiculées par les Anglais et les Bourguignons. À Orléans, les Anglais moquent la « ribaude », c’est-à-dire la fille à soldats. Cette thèse sera popularisée par… Shakespeare, à la fin du XVIe siècle. Dans son drame « Henri VI » https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_VI_(Shakespeare), Jeanne est enceinte, mais elle ne sait pas si c’est du roi, du duc d’Alençon ou de René d’Anjou. « Il y en a tant qu’elle ne sait pas trop qui accuser », ironise un autre des personnages de la pièce, le duc d’York.

  1. Elle était surnommée « la pucelle » à juste titre

VRAI. En 1429, avant qu’elle ne rencontre Charles VII, sa virginité est vérifiée au château du Coudray (près de Chinon)*, sous la responsabilité de Yolande d’Aragon, la belle-mère du roi. Elle est jugée « femme et vierge, bonne et humble personne ». Cette virginité, qu’elle s’est engagée à respecter pour obéir aux voix, est même attestée à Rouen en 1431 par ses accusateurs.
*https://fr.wikipedia.org/wiki/Château_du_Coudray_Montpensier

  1. Sur le bûcher, elle a été remplacée par une autre femme et a ainsi échappé au supplice

FAUX. Malgré l’exécution de Jeanne en place publique, le 30 mai 1431, cette légende a été colportée rapidement. Au début du XVe siècle, l’auteur anonyme d’une chronique intitulée Journal d’un bourgeois de Paris rapporte: «Maintes personnes croyaient fermement que par sa sainteté elle se fut échappée du feu.» Et cette fable a même suscité une vocation : en mai 1436, une jeune femme de Metz déclare qu’elle est la Pucelle. Deux frères de Jeanne la rencontrent et assurent qu’il s’agit bien d’elle ! La revenante rencontrera le roi Charles VII… avant d’avouer son imposture en 1440.

  1. On l’a canonisée très peu de temps après sa mort

FAUX. Jeanne a été relativement oubliée jusqu’au XIXe siècle. En 1841, l’historien Jules Michelet la redécouvre et lui consacre un ouvrage. Puis, après la défaite des troupes françaises en 1870 et la perte de l’Alsace et de la Lorraine, la jeune femme originaire de Domrémy, village des Vosges, devient une icône nationaliste et le symbole de la reconquête à venir. Alors, « pour empêcher les républicains de s’accaparer Jeanne d’Arc, les courants monarchistes et catholiques lancent le processus de canonisation », indique l’historien Franck Collard, auteur de La Passion Jeanne d’Arc. Mémoires françaises de la pucelle (éd. PUF).» Ce processus est entamé en 1869, et aboutit le 16 mai 1920. Voilà donc exactement un siècle que Jeanne est une sainte !

https://photo.caminteresse.fr/jeanne-darc-en-10-idees-recues-42727?#1-son-histoire-commence-quand-elle-entend-des-voix-b0nht

0 thoughts on “Jeanne d’Arc en dix idées reçues via le site « ça m’intéresse ».

  1. Irène Pincemaille

    Merci pour ce beau résumé de la vie de Jeanne et pour l’énumération et la réfutation des c… abjectes balancées contre elle depuis l’origine.
    Il y a toutefois une inexactitude : « Le Sacre n’avait rien d’indispensable » mais si bien sûr car c’est le Sacre qui fait le Roi ! auparavant, Charles VII n’était que le « gentil Dauphin » ! et c’est si vrai que les Anglais, à la mort d’Henri V, s’étaient empressés de faire « sacrer » à Notre-Dame le tout jeune Henri VI, même si la traitresse Isabeau (qui reniait son propre fils) avait déjà livré la France aux Anglais, mais ceux-ci savaient que : pas de Sacre, pas de Roi !!!
    Et ce principe capital s’est poursuivi jusqu’à la fin de la Monarchie Française.
    Amitiés à tous.

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