Je suis certain que vous vous demandez ce que Napoléon a bien pu faire à Saumur et à son économie et pourquoi on pourrait lui en vouloir ? La raison ? Toute simple. Le découpage des départements en 1790 à la serpe du pouvoir des Sénéchaussées. C’est Napoléon qui l’a appliqué à son arrivée au pouvoir… Ah si seulement, il avait pris en compte les données culturelles des territoires et était revenu sur le choix… Le Saumurois ne flirterait peut-être pas avec les 10% de chômage…
Nous sommes en 1790, il est question de créer un département autour de Saumur comprenant les villes voisines que sont Bourgueil, Chinon, Richelieu, Thouars et Loudun. Les deux représentants de Saumur, Charles-Élie de Ferrières et Jean-Étienne de Cigogne, se sont battus en vain pour faire accepter ce choix. Ce ne fut pas le cas. Le département de Saumur, situé au carrefour des trois provinces de l’Anjou, de la Touraine et du Poitou ne fut pas créé. Les élus saumurois accusaient, alors, les représentants d’Angers de s’entendre avec leurs collègues du Maine et de Touraine pour le dépeçage de la sénéchaussée de Saumur. Ils les accusaient également d’abandonner à la Touraine 24 paroisses anciennement angevines (autour de Château-la-Vallière et de Bourgueil). Le mécontentement grandit, on trouve même la trace de manifestations de la population à Bourgueil et à Saumur.
Le temps a la dent dure.
Cela a dû être un coup de grâce pour la ville de Saumur qui se remettait à peine de la révocation de l’Édit de Nantes, après avoir été une capitale universitaire protestante. La ville comptait d’ailleurs plus d’habitants à l’époque qu’aujourd’hui. Ce qui est étonnant, c’est que 230 ans après, malgré ce découpage, les liens entre les communes de ce département imaginé existent toujours. Le Schéma de cohérence territorial du Saumurois (SCOoT), réalisé il y a quelques années, l’a appelé la zone de chalandise de Saumur. Il met à jour, notamment, que le nombre de déplacements entre la “nouvelle Touraine” proche et Saumur est plus important que celui de Saumur vers Angers. Pour illustrer ce fait, un bus amène depuis toujours, des gamins du bourgueillois au lycée Saint Louis. Plus cocasse, le maire de Loudun, écrit dans l’édito de son site internet “à la révolution en 1790, le Sud Saumurois est rattaché à la vienne“, comme s’il cherchait une raison pour excuser les difficultés de sa petite commune située à une heure de sa préfecture. Aux confins de la région Centre, des Pays de la Loire et de l’Aquitaine, ce n’est pas facile pour ses communes d’avoir le cul entre trois chaises…
Cet accident historique n’explique peut-être pas tout. Mais l’idée de désigner un coupable m’a amusé. Et comme c’est la semaine où on remet à l’honneur Napoléon et où dans les médias, chacun revisite l’Histoire à sa manière, je me suis permis de le faire. Mais je me dis tout de même que si Saumur avait été préfecture, il est fort probable que sa situation économique actuelle aurait été meilleure.
Michel Choupauvert