Avant-propos:
Le résumé ci-dessous de l’étude des ascendances davidiques des rois de France propose un autre cathéter d’injection davidienne autre que l’intervention légendaire de Jude, fils de Jacques le mineur, convoyé en Gaule par le non moins légendaire Joseph d’Arimathie. Cette voie d’accès est documentée à partir de la dynastie des exilarques juifs d’Irak au VIIIè siècle. Il est établi que depuis la déportation à Babylone, la souche est davidienne. Il est établi aussi qu’un scion de cette lignée a fait souche en Septimanie. Et tous les généalogistes convergent sur le fait qu’elle est entrée dans la maison des pippinides en épousant une fille de Charles Martel, Alda de Francie. Nous avons choisi délibérement pour pivot entre ascendance et descendance un personnage indiscutable qui est Guilhem de Gellone (755-812) lequel, outre sa geste de preux et sa présence dans toutes les annales du temps, a laissé témoignage de son importance en l’abbaye de Saint-Guilhem-le-Désert (Hérault) où il se retira.
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ASCENDANCE
L’ascendance de Guilhem de Gellone remonte en ligne directe aux exilarques juifs d’Irak, succédant par le sang aux exilarques de Babylone lesquels procèdent par le sang toujours des exilarques de Jérusalem dont le second, Salathiel ben Jechaniah (597AC/540AC) est le fils du 22ème roi de Juda, Jéchonias de Judée mort libre en 562AC, de la dynastie de David. Selon la Bible, il y a 18 ou 19 rois entre ce dernier et le roi David (1040AC/962AC).
C’est donc le fils du 2è exilarque juif d’Irak, fils lui-même du 34è et dernier exilarque de Babylone, qui débarque à Narbonne. Il s’appelle Natronaï David (672-739). Que vient-il y faire ?
Il est appelé par les bourgeois juifs de la ville à la direction de la forte communauté israélite de Narbonne qui rayonne sur toute la Méditerranée occidentale par le commerce, les arts et les sciences. Une thèse de 400 pages plus 30 p. d’appareil critique, (éditée par l’Université de Columbia sous la plume d’Arthur Zuckerman en 1972 – bon courage https://en.wikipedia.org/wiki/A_Jewish_Princedom_in_Feudal_France) tend à prouver que des domaines le long du fleuve Atax auraient été donnés aux Juifs de Narbonne par Pépin le Bref en rémunération de leur concours à la guerre des Francs, formant une principauté dans l’empire naissant. Les historiens admettent que cette entrée du sang de David dans la maison usurpatrice compense son défaut de légitimité hématique malgré leur souci d’épouser les femmes mérovingiennes disponibles. Ces possessions juives devaient être organisées autour d’un exilarque (roi en exil) du meilleur sang. D’où l’appel à Bagdad. Zuckerman l’appelle Makhir, patronyme hébreu de Natronaï en aramaïque. Mais l’important n’est pas tant le motif bien embrouillé que la suite donnée.
DESCENDANCE
Sous la férule de Charles Martel, le premier exilarque de Narbonne est marié en 705 à une noble franque, Chrodelinde d’Austrasie (678-740), de laquelle il a un fils unique, Thierri d’Autun*** (705-762) lequel épousera Rolinde d’Aquitaine avec laquelle il aura un fils, Théodoric le Pieux (730-793) lequel épousera une fille de Charles Martel, Alda ou Aude de Francie (722-795) qui lui donnera 5 enfants “davidiens” au sein de la maison des Pippinides. Parmi eux, Guilhem de Gellone, mais aussi :
1/ Sigisbert ou Gilbert de ROUERGUE (750-820)
3/ Thierri II d’AUTUN (755-804)
4/ Adalelme d’AUTUN (760-803)
5/ Aube d’AUTUN (770-)
Pour savoir si l’injection a abouti à un roi de France, il convient d’explorer toute la descendance de ces cinq enfants injectés. Ce que nous ne faisons qu’amorcer…
note*** : si on veut attaquer la thèse narbonnaise, c’est à cette charnière ; mais il faudra contrer Zuckerman qui s’est farci moult censiers, terriers et cartulaires de l’époque considérée. La critique littéraire la plus serrée fut celle de Gérard Nahon dans Le Annales en 1975, que l’on peut lire dans Persée ici : https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1975_num_30_2_293610_t1_0363_0000_001
Partie 2
[Suite 2/2 :]
(1) Sigisbert de Rouergue donne la lignée des Raimon de Toulouse jusqu’à la dernière fille de la ligne directe Jeanne de Toulouse mariée par traité au frère de Louis IX, Alphonse de Poitiers. L’injection davidienne pénètre alors la maison royale de France mais le couple occupé à la croisade mourra sans enfants en 1271 en Italie.
(2) Guilhem de Gellone engendre Héribert de Gellone (comte de Toulouse) dont les filles épouseront des Pippinides d’Italie. Cause perdue !
Puis remarié, il engendre Thierri III d’Autun (790-826) qui engendre avec Emma de Bavière une fille unique, Endelberge d’Autun (825-900) laquelle épouse Louis II des Carolingiens, fils de Lothaire Ier. Bingo, l’injection davidienne entre dans la maison royale.
Le couple n’a qu’une fille, Ermengarde que l’on mariera au roi de Bourgogne, Boson V de Provence. Ils auront, après trois filles, Louis III de Provence, dit l’aveugle, empereur d’Occident. La deuxième race de rois est injectée. Etude des Guilhermides à faire…
(3) Thierry II d’Autun engendre une fille unique, Alba qui engendre Bernard Ier, comte d’Auvergne et Théodoric, comte de Châlon s/Saone. A explorer…
(4) Adalelme d’Autun ouvrira la maison de Poitiers qui se répandra au sud jusqu’en Catalogne. Cause perdue !
(5) Aube d’Atun n’aura pas d’enfant.
Place maintenant aux généalogistes distingués qui nous prouveront que l’injection davidienne a touché Hugues le Grand voire son fils, le premier des capétiens. Ou plus tardivement peut-être quelque scion de la race des rois, comme on l’a vu presque arriver avec Alphonse de Poitiers. Quid de Henri IV de France, descendant de Bernard VI d’Armagnac, sire d’Albret, et de Cécile de Rodez (1278-1312) injectée par son ascendance des comtes de Rodez ? Il s’agit de douzaines de descendances à explorer, bien au-dessus de mes forces, mais à le faire au plus court, je me concentrerais sur le Vert-Galant, parce qu’il fut un grand… “disséminateur” !
Autre conséquence : connaissant la forte impatience des nobles de ce temps à se reproduire, il n’est pas douteux que des milliers ou des dizaines de milliers de Français d’aujour’hui soient d’ascendance davidique, sans passer par les marranes d’Espagne, réfugiés chez nous, voie dont Roger Peyreffitte recensait les avatars contemporains dans son bouquin “Les juifs”.
Aparté : la maison rouergate d’Arpajon procède d’Hugues Ier de Rodez (+1159). Cette prestigieuse maison comtale est injectée par les femmes Guilhermides de la maison de Narbonne. Il est possible que la harpe d’Arpajon soit une souvenance de leur origine davidienne lointaine. Mais cela n’est pas mon domaine.
Note presque sûre : Il est question plusieurs fois dans les textes d’un roi des juifs de Narbonne ou de Septimanie, et aussi d’une reine des Juifs de Narbonne. Les témoignages d’une communauté israélite organisée et souveraine en justice dans la capitale de Septimanie sont nombreux. Mais on ne trouve pas de “royaume” de Narbonne ou de Septimanie dans les grimoires, ne fut-il que juif. Il n’est pas douteux que le carolingien (et même déjà le sage Pépin le Bref) ait reculé à l’idée de circonscrire des possessions juives dans un vrai royaume étranger enchâssé dans l’empire aux portes de la marche d’Espagne toujours contestée ; mais l’usage d’appeler “rex” qu’en firent les Juifs de leur exilarque ressortit plutôt à celui qu’on emploierait pour la “Reine des Gitans”. Ca fait plaisir et n’emporte pas conséquences.
Bibliographie convenant à une étude plus poussée – Masse des liens utilisés en clair :
– Généalogie des exilarques de Babylone :
https://www.genealoj.org/fr/famille-dautun-origine-juive-ha-david
– Généalogie de Bustanaï ben Haninaï David (34è exilarque de abylone et 1er exilarque d’Irak):
https://gw.geneanet.org/arnac?lang=fr&pz=mado&nz=boudet&p=bustanai+ben+haninai&n=david
– Généalogie de Nehemiah Ben Haninaï David (2è exilarque d’Irak):
https://gw.geneanet.org/arnac?lang=fr&pz=mado&nz=boudet&p=nehemiah+ben+haninai&n=david
– Généalogie de Natronaï David (1er exilarque de Narbonne):
https://gw.geneanet.org/arnac?lang=fr&pz=mado&nz=boudet&p=natronai&n=david&oc=1
– Généalogie de Yehudaï Habibaï ben Natronaï David son fils :
https://gw.geneanet.org/arnac?lang=fr&n=david&oc=0&p=yehudai+habibai+ben+natronai
– Généalogie de Theodoric :
https://gw.geneanet.org/pautrat?lang=fr&pz=regis+vincent&nz=pautrat&p=thierry+theodoric+habibai+ben+natronai+david&n=de+vienne+d+autun
– Theodoric (d’Autun) :
https://gw.geneanet.org/citron06?lang=fr&n=d+autun&oc=0&p=theodoric+i
– Généalogie de Guilhem de Gellone :
https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9ribert_(fils_de_Guillaume_de_Gellone)
– Une généalogie des Guilhermides :
http://thierryhelene.bianco.free.fr/drupal/?q=node/59
– Colonies juives en Languedoc :
https://jguideeurope.org/fr/region/france/languedoc/
– Narbonne dans la Jewish Encyclopedia :
https://jewishencyclopedia.com/articles/11323-narbonne
– Le roi juif de Narbonne :
https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1997_num_109_218_3784
– Juifs de Narbonne :
http://www.corbieres-matin.fr/index.php/les-juifs-de-narbonne-suite/
– Chronique des juifs du Languedoc :
https://dis-leur.fr/chronique-lhistoire-oubliee-des-juifs-du-languedoc/
– la base Zuckerman :
https://en.wikipedia.org/wiki/A_Jewish_Princedom_in_Feudal_France
– Censiers et terriers :
https://www.persee.fr/doc/efr_0000-0000_1977_act_31_1_2249
– Page 207-210 du Princedom :
https://www.jstor.org/stable/599021
– Recension du bouquin de Zuckerman par Patric Choffrut – Royaume/principauté juive de Septimanie :
https://acjp.fr/uploads/articles/bba31ad3e51a5d5d368a9c17a8ffba38.pdf
– Communauté juive narbonnaise :
http://www.wiki-narbonne.fr/index.php?title=La_Communaut%C3%A9_Juive_sous_le_r%C3%A8gne_des_Vicomtes
– Deux critiques du bouquin de Zuckerman :
https://acjp.fr/uploads/articles/bba31ad3e51a5d5d368a9c17a8ffba38.pdf
https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1975_num_30_2_293610_t1_0363_0000_001
– Le bouquin en cause chez Amazon :
https://www.amazon.fr/Jewish-Princedom-Feudal-France-768-900/dp/0231032986 à 508,77 euros
– Ambassade carolingienne à Bagdad – Isaac le Rhadanite que Charlemagne dépêcha à Bagdad en qualité d’ambassadeur :
http://www.wiki-narbonne.fr/index.php?title=Judith_reine_de_Narbonne
– Evangélisation des Gaules :
https://www.lavie.fr/idees/histoire/levangelisation-des-gaules-une-voie-singuliere-8702.php
Merci à Catoneo de nous rendre compréhensible ce qui, au fond, ne l’est pas tant que ça ! Néanmoins, et bien que nous adhérions pour une large part à son raisonnement, il faut bien dire que pour séduisante qu’elle soit la thèse de Zuckerman reste discutable pour beaucoup d’autres d’auteurs. Pour éviter trop de verbiage, voici deux liens utiles qui résument les sujets de controverse et que nous vous conseillons de lire attentivement (la référence Wikipédia vous permettra de vous plonger, en particulier, dans le travail de M. Klein) : https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1973_num_85_112_4805
et aussi https://fr.wikipedia.org/wiki/Makhir_de_Narbonne
Nous pourrions, par exemple, relever les critiques de la méthode de Zuckerman (avec, entre autres, des hypothèses devenant… des certitudes) ou le conflit de pensée entre les serments prêtés au souverain par ces proto-féodaux juifs dans un contexte aussi encadré par l’Eglise comme l’étrangeté d’un « complot du silence » des auteurs contemporains sur une telle affaire… Mais, après tout, comparaison n’est pas raison.
Quoi qu’il en soit, une chose est certaine : une importante communauté juive, d’origine davidique, a bien vécu en Septimanie et y a tissé de nombreux et importants liens. Dont, à coup sûr, des liens matrimoniaux (n’oublions pas combien le mariage fut une clé du pouvoir dans l’Occident médiéval, comme le fut aussi le rôle de ceux qui détenaient le nerf de la guerre comme nous le verrons plus tard à Montpellier).
Rappelons enfin que la principale seringue de ces diverses « injections », pour reprendre l’expression humoristique de Catoneo, est la famille des Guilhelmides (directement apparentés aux Carolingiens) partie d’Aix-la-Chapelle à la conquête du centre et du sud de ce qui sera plus tard la France en passant par la Bourgogne (les Thierry, Guillaumes et autres Bernard qui ont fait souches dans tout le midi et que nous retrouverons aussi bientôt). Merci encore, en tout cas, de nous aider à sortir des légendes. Mais, en plus, ne manquons pas d’avoir une pensée pour Saint-Guillaume (Guilhem de Gellone), à qui tant de Français doivent tant sans le savoir, lorsque nous visiterons Saint-Guilhem-du-Désert !
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