Chemin d’Assise- Saison 2
Pluie…
En mai dernier,(2022) nous abandonnons le chemin à Anost (Saône-et-Loire), dans le Morvan, à hauteur de Château-Chinon. Fin septembre, Philippe, l’ami de « la Loire Johannique » nous dépose au point quitté, moins hospitalier car sous la grisaille et un ciel menaçant. L’auberge réservée ne peut remplir sa mission, faute de cuisinier! Pénurie de personnel dans différents corps de métier, restauration, artisanat, commerce : c’est le leitmotiv, la plainte exprimée au fil des contrées traversées. Chapelet à l’église abritant une « Vierge ouvrante », statue médiévale très rare car munie d’un dispositif d’ouverture révélant une scène religieuse, en l’occurrence la Trinité. Dîner sommaire au gîte d’étape et au petit matin, pluie tant annoncée au menu, ce qui empêche nullement notre chauffeur « uber lettré », d’entamer la journée en devisant avec Claude sur… Christine de Pisan. Pendant ce temps, je boucle mon paquetage rudimentaire sans pouvoir mettre la main sur le sac poubelle sensé envelopper mes affaires, précaution indispensable par ciel bas et lourd. Flagrant délit d’impréparation. Symboliquement, Philippe nous accompagne sous une pluie battante jusqu’au (presque car rapidement trempé !) début du fameux chemin balisé par le Tau franciscain. « Que vont-ils faire dans cette galère», doit-il penser dans son for intérieur avant d’interroger Claude : « Vous y allez quand même ? ». « Tu ne connais pas Ariane », lui répond ma moitié.
Donativo
J’aime porter les habits de nos chers disparus, manière de les emporter avec moi en voyage. Cette fois, c’est la pélerine bleu clair de ma maman que j’adopte pour me protéger des intempéries. Jolie certes, mais perméable en diable! Très rapidement la pluie -trois heures non stop- fait son chemin dans mon attirail, entravée partiellement par une couche de vêtements. Je n’en dis mot à Claude, histoire de ne pas essuyer les foudres…
Un panneau indique « maquis Socrate », dernier clin d’oeil du passé résistant entrevu sur la route morvandelle; plus loin, l’histoire nous rejoint encore avec ces baraquements ayant abrité les Harkis au lendemain de la guerre d’Algérie, une plaque commémorative en atteste. Abri providentiel que cette petite chapelle dédiée à sainte Claire, sœur d’âme de saint François qu’on invoque pour qu’il pleuve (pas trop tout de même, merci…), peinte par un moine de l’abbaye bourguignonne de la Pierre-qui-vire, joyau entretenu avec amour par les habitants du cru. A 12 h 15 tapantes, une éclaircie vient égayer notre premier pique-nique.
Tapis de châtaignes et premiers ceps l’après-midi : l’éternel été nous avait fait oublier l’existence d’un possible automne. Aucune onde de portable ne passe dans ces forêts profondes du Bas Morvan fréquentées en revanche, apprend-on, par quelques loups et lynx. En soirée, nous sommes hébergés au Puits-Morin, commune de Saint-Prix. Grâce à Joëlle, nous découvrons la formule originale de l’accueil pèlerin mis en place au fil des étapes par les initiateurs de ce Chemin d’Assise, lancé il y a 15 ans. Pas de tarif fixé, laissé à l’appréciation des hôtes de passage. Belle rencontre, repas succulent : auparavant je transforme l’étage en campement de romanichels avec mes vêtements trempés… secs au matin! Je quitte les lieux équipée d’une pèlerine digne de ce nom prêtée par cette dame au grand cœur.
Chemin mystique
Un bien grand mot pour résumer l’attrait irrésistible exercé à mon humble endroit par les chemins ancestraux. Ils « vibrent » d’une mémoire primordiale dont ils sont les véhicules. Voies romaines, chemins creux, sentiers des galvachers du nom des paysans du Morvan qui exportaient naguère leurs services accompagnés de leurs bœufs, lignes de crête, d’anciens tacots ou petits trains, sentiers de pierrailles, chemins bordés de murets édifiés pierre par pierre par nos aïeux, mais également petits axes secondaires à taille humaine, minces rubans de macadam empruntés par deux véhicules/heure : émouvant Chemin d’Assise qui conjugue toute la panoplie des axes de circulation version lente, propices à la contemplation. Nous découvrons l’existence d’une «route des Celtes » qui mène à Bibracte, site archéologique situé à 5 kilomètres à vol d’oiseau. Bibracte était aux II et 1er siècles avant Jésus-Christ un oppidum, une agglomération fortifiée construite sur le mont Beuvray, et avait été choisie comme capitale des Eduens, l’un des peuple les plus puissants de la Gaule, alors alliés de Rome. Enclose par un mur d’enceinte, elle abrite à son apogée une population que l’on estime entre 5 000 et 20 000 habitants.
A la sortie de Saint-Léger-sous-Beuvray, à la mi-journée, nous sommes providentiellement abrités sous l’auvent de la Maison du Beuvray, pôle culturel en milieu rural, le temps du pique-nique. Quelle aubaine car, trois-quarts d’heure durant, une pluie torrentielle s’abat sur la châtaigneraie alentour. L’après-midi sera nettement plus serein, de belles éclaircies nous permettant d’apprécier le paysage alternant collines et parties boisées : adieu la forêt, voici les vaches blanches de race charolaise ou montbelliarde paissant dans leurs enclos ceints de haies plessées, spécifiques à la région. Pommes, poires et noix abondent en chemin.
Anciennes écuries
Au terme de notre bonne quinzaine de kilomètres quotidiens, nous sommes hébergés à Brion (Grand Autunois) à nouveau dans un « accueil pélerin », en l’espèce le sous-sol aménagé d’une vaste demeure où nous partageons le dîner avec un couple. La journée du lendemain débute par une nappe épaisse et féerique de brouillard qui se dissipera pour céder la place à un soleil généreux. Je me déleste progressivement de ma couche de vêtements, quel soulagement. Nous quittons progressivement le Morvan et un je-ne-sais-quoi de méridional se fait pressentir. En début d’après-midi, nous arrivons quelque peu harassés à Broye, où -ô miracle, c’est tellement rare dans la contrée– un petit bar-épicerie est ouvert. La patronne, petit ange-gardien réputé comme tel au village, offre gâteaux et pâte de coing avec le café, nous encourage à aller visiter la petite église, et nous indique le fameux château des Guise où nous avons réservé la nuitée. Soit deux kilomètres supplémentaires pour gravir le mont Arnaud. Le château.. il s’agit en l’occurrence d’un curieux bâtiment à colombage dans le style chalet suisse, mode lancée par la princesse Eugénie. La propriétaire des lieux, descendante d’un ancien industriel du Creusot, nous offre œufs et figues pour le dîner et nous conduits vers les anciennes écuries, logement rustique mais ô combien enchanteur. Nous passons la soirée en compagnie de deux jeunes pélerins, Audrey, la sage-femme qui enchaîne ses 30 kms quotidiens pour apaiser sa peine amoureuse et Luc, chef d’entreprise de Lyon qui se vide la tête et fait le point sur son VTT. Ce marathonien a quitté Vézelay la veille; il admet que la concentration déployée laisse peu de champs à la méditation.Mais avant cela, après-midi au soleil dans le parc arboré et agrémenté d’un étang où nous lisons le superbe livre de François Cheng sur saint François d’Assise, trouvé sur place ; puis demandons à la propriétaire l’autorisation de nous retrouver tous ensemble pour réciter le chapelet dans l’oratoire privé, dédié à saint-Louis.
Sur les traces de l’empereur Auguste
Après notre journée de marche, nous n’avons pas trouvé d’autre point de chute (réservé comme d’habitude la veille pour le lendemain) que cet accueil pèlerin, en fait une salle paroissiale située à Saint-Pierre-de-Varennes où, fort heureusement, nous sommes les seuls occupants. Deux lits superposés, bonne chaleur alors que la tempête sévit et la pluie tombe à verse durant toute la nuit. A l’abri certes, mais pas d’eau sur place pour la toilette et le repas, il nous faut affronter les intempéries pour aller quérir à 20 m l’eau dans les sanitaires du gymnase voisin. A la guerre, comme à la guerre, répétai-je à plusieurs reprises, histoire de nous galvaniser.
Etant à un jet de pierre d’Autun (Augusto dunum, forteresse d’Auguste), nous décidons d’aller y faire un crochet le dimanche en taxi. Fondée par l’empereur Auguste (le prénom de notre petit-fils), cette cité devient capitale gallo-romaine des Eduens en remplacement de Bibracte, évêché dès l’Antiquité. Autun est jusqu’à la fin du Xve siècle une cité prospère et un centre culturel influent en dépit des pillages et invasions. Son enclavement géographique et la concurrence croissante de Dijon, Chalon-sur-Saône et plus tard du Creusot ont contribué à son déclin au cours des siècles suivants. En ce dimanche ensoleillé, nous découvrons une « belle endormie » à l’image hélas de beaucoup de villes françaises. Un cœur de ville magnifique, mais des demeures visiblement désertées. Au coin d’une rue, une plaque indique que c’est là que fut inventé le collant sans couture, d’où l’actuelle présence de l’entreprise DIM. L’enceinte romaine et le théâtre antique, le plus grand d’Europe, sont impressionnants. Au faîte du « dun », la cathédrale est placée sous le patronage de saint Lazare dont elle abrite les reliques soigneusement cachées. J’ai beau mené l’enquête, je ne saurai pas précisément où ! Belle homélie autour de l’évangile selon saint Luc sur le thème suivant : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : « Déracine-toi et va te planter dans la mer, et il vous aurait obéi ». L’occasion de faire le parallèle entre l’actuelle pénurie de moutarde et celle, plus dramatique, de la foi. J’apprécie l’invitation du prêtre à « cultiver, nous remettre dans notre castrum ». Ce qui m’exaspère en revanche, c’est la réticence de beaucoup de paroissiens à échanger un signe de paix en se serrant la main. Le covidisme laisse des traces durables…
Rencontres improbables
Un jour, après avoir gravi une côte interminable et alors que nous cherchons à repérer le fameux Tau, nous rêvons d’une halte dans un café. Mais de café, que nenni, ici comme ailleurs ! En revanche, un homme nous indique le bon chemin et nous invite à prendre une boisson dans son garage histoire, sûrement, de nous montrer sa collection de petites voitures amassées au fil des années passées à travailler dans les déchetteries. Un petit musée de l’automobile miniature !
C’est très rare de croiser quelque âme en chemin. En route pour Ecuisses, une dame en VTT et son mari qui la suit en courant surgissent tout à coup. Nous échangeons quelques mots, l’écoutons plutôt nous raconter par le menu son mal incurable. En l’espèce, un pneumocoque venu se loger dans son genou l’empêchant de faire autant de sport que par le passé. Je la réconforte en lui disant que… tout de même la voici capable de faire du VTT alors que d’autres sont cloués sur leur lit de souffrance. Elle me répond que tout effort physique est suivi de douleurs. Et que de toutes manières, elle n’a pas le choix : « C’est soit rester devant ma télé ou me jeter à l’eau ! ». Nos chemins se séparent et je m’en veux de ne pas avoir osé glisser un mot sur la foi qui pourrait l’aider à traverser l’épreuve. La voici qui resurgit à nouveau, ce qui me permet de placer mon grain de sel à ce sujet. « Oui, c’est vrai, mais je n’ai pas la foi ». Faîtes mon Dieu que Françoise fixe votre Croix.
Cauchemard
Nous nous acheminons vers la zone des anciens pays miniers, Montchanin, Creusot-les-Mines, carrefour autoroutier, de grands axes routiers, ligne de TGV Paris-Lyon. Nous craignons le pire d’autant que nous n’avons pas trouvé d’accueil pèlerin pour le soir, et sommes obligés de nous rabattre sur un Formule 1, bon marché car en attente de travaux de mise aux normes. La cité d’Ecuisses nous accueille avec son décor de rêve, le canal du Centre et ses écluses, les maisons et commerces finement décorés de céramique produite sur place fin XIXè-début XXè notamment par la famille Perusson. Deux kilomètres en sus le long du canal nous attendent pour accéder au fameux hôtel déclassé, situé comme ses homologues, dans un no man’s land. Facile d’accès pour les automobiles, mais hyper dangereux pour les marcheurs que nous sommes! Environnement surréaliste entre la station Total et le parking envahi de camions de toute provenance (l’entrée d’autoroute est à côté) avec les vestiges de l’ancien temps, à l’époque où la grand’route passait par là : ginguette au bord de l’eau (actuellement un restaurant fermé ce jour-là faute de personnel), maisons occupées par des personnes âgées qui, on ne sait comment ni pourquoi, se maintiennent dans ces marches de l’enfer. Les chats abondent dans le secteur et la jeune gardienne du Formule 1 passe son temps à nourrir toute flopée de vagabonds. Au petit matin, les tables du petit-déjeuner sont occupées par des travailleurs qui, pour la plupart, ne parlent pas français, le regard vissé comme ailleurs sur leur smart phone, le nin-nin de l’époque. La veille, faute de courage pour nous aventurer en ville, nous avons dîné à côté dans un restaurant franchisé. A son sortir, en traversant une route, nous avons failli être renversés par une voiture. Persuadés que le conducteur allait nous céder le passage, nous marchions confiants. Rien n’en a été et quelque chose a fait que nous nous sommes arrêtés juste à temps.. Notre ange gardien était de service assurément…
Frère Guylain
Une bonne journée de marche entre collines et prairies où paissent vaches ou moutons, pour atteindre Rimont où nous avons réservé la nuitée chez les frères de Saint-Jean. Un village haut perché riche d’un patrimoine architectural de toute beauté. Fondé au XIe siècle par des Cisterciens, ce vaste domaine tour à tour séminaire diocésain puis petit séminaire est aujourd’hui la maison-mère de cette communauté nouvelle, plaque-tournante et centre de formation. Comme partout, nul n’est prophète en son pays et les habitants du lieu se soucient pour majorité comme d’une guigne de la proximité de ces religieux. Pauvre France déchristianisée… Le frère-hôtelier frère Guylain est chargé d’accueillir les hôtes de passage dont un certain Abel que nous retrouverons sur le chemin deux jours plus tard. Un pèlerin professionnel, miraculé d’un accident de la route, et qui marche pour son « petit frère » qui vient de mourir, nous apprend-il encore tout éploré. Le frère-hôtelier est vraiment à sa place, disponible, grand connaisseur car natif de la région. C’est lui qui nous apprend que nous entrerons le lendemain en territoire viticole, appellation cote chalonnaise. Il nous invite à être attentifs au travail des anciens, à certaines maisons et petites chapelles dont les toitures ont été édifiées en pierre de lauze (lave). Et à faire halte devant le château privé de Pontius de Tyard, un génie universel méconnu, prélat, écrivain, poète, membre du cercle littéraire de la Pléiade. Nous fêtons en ce jour la fête de saint François d’Assise, l’ « alter Christus » qui porte notre entreprise et avons providentiellement la grâce d’une messe privée dite en soirée par ce frère qui est également prêtre. Le lendemain, c’est sainte Faustine Kowalska, l’apôtre polonaise de l’amour miséricordieux que nous aurons à nouveau le privilège de fêter au cours d’une messe très matinale.
La révolution est passée par là
Nous cheminons à présent dans le Mâconnais Sud Bourgogne. On se croirait encore en plein été, tout va bien. Pas de mal de dos (contrairement à mai dernier concernant Claude), nous savons doser nos efforts, ne pas aller au-delà de nos limites, un léger signal pour ma part qui point dans un tendon en haut de la jambe droite quand je force trop le pas. Nous arrivons à Saint-Gengoux-le-National, une cité pittoresque avec ses échauguettes et autres témoignages de son riche passé médiéval où l’influence de Cluny se fait prégnante. C’est justement parce qu’il veut installer son in- fluence en Bourgogne méridionale que le roi Louis VII prend prétexte des incursions du comte de Chalon sur les terres de l’abbaye de Cluny pour intervenir militairement. A partir de cette époque, les rois de France se servent de la ville comme un appui pour étendre leur pouvoir dans la basse vallée de la Saône. D’où l’appellation de Saint-Gengoux initialement qualifié de « le-Royal », transformée après la révolution en «Jouvence » (en raison de la présence de nombreuses sources), puis depuis 1882 « le-National ». L’église recèle de nombreux trésors, dont une statue de Jeanne d’Arc –une des plus belles jamais vue– et un vitrail représentant la martyre au bûcher. Avis à nos amis johanniques ! L’accueil « donativo » du lieu se trouve en plein cœur de la cité, il s’agit d’un meublé, 15 euros la nuit. Trois anecdotes à signaler : les rues et enseignes de la ville sont dotées de parapluies et rubans roses dans le cadre de l’opération « octobre rose » pour prévenir le cancer du sein. La vulgarité du matériel de « propagande pour le bien » tranche avec la beauté des lieux et je songe à ce mois d’octobre, baptisé mois du Rosaire par l’église catholique, qu’on s’ingénie à singer tout en subvertissant le sens initial. Le commerce n’a pas l’air bien florissant. Nous entrons dans une pâtisserie. Sur une vitrine, une bande en plastique où on lit « scène de crime » ; le patron s’apprêtant à partir en vacances a jugé bon de fêter Halloween avant l’heure et quand il reviendra en novembre, il lui faudra songer à Noël, nous annonce-t-il. Enfin, du jamais vu, dans le centre-ville : une bijouterie-cadeaux agrémente son offre avec un rayon très fourni d’alcool forts.
L’empreinte de Cluny
En route pour Taizé, nous faisons halte au hameau de Saint-Hippolyte, hameau de Bonnay où se trouve les vestiges d’une église construite en 910 par les clunisiens (ordre de saint Benoît), l’une des premières églises fortifiées de Bourgogne. https://bourgognemedievale.com/departement-et-pays/saone-et-loire/pays-chalonnais-entre-grosne-mont-saint-vincent/bonnay/ Une association de protection du patrimoine a contribué à restaurer cet ensemble bâti sur un promontoire. Grâce à un panneau explicatif, nous lisons : « Cluny, centre de réforme de l’église compte plus de 1800 lieux clunisiens épousant les dimensions de la chrétienté jusqu’à Jérusalem. Il accompagne et infuse le développement de la société médiévale et marquera à jamais le continent européen de son empreinte ». Fondé au Xe siècle, cet ordre monastique sera supprimé à la révolution.
Dans l’après-midi, nous parvenons à Ameugny, à un kilomètre de Taizé, centre oecuménique mondialement connu, fondé par le frère Roger assassiné pendant la prière commune du soir, en août 2015. Gravée sur le porche de l’église, la formule me plaît : « Lex Dei vera est » (la loi de Dieu est vraie). Nous croisons plusieurs jeunes qui vont et viennent, des étrangers, allemands, hollandais. Ce pôle religieux attire une foule immense. J’en ai la preuve le soir même : début octobre, hors vacances scolaires, plus de 600 personnes, des jeunes pour la plupart, se retrouvent pour une veillée chantée admirablement, psaumes à l’unisson. Nous sommes hébergés chez une certaine Stéphanie, professeur de flûte traversière. Incroyable mais vrai, c’est cette musicienne même rencontrée cet été dans un rassemblement à Meung-sur-Loire au côté de sa sœur Annabelle, violoncelliste. J’avais spontanément sympathisé avec elle. Autant dire que le surnaturel s’impose ce soir-là dans nos échanges. Le lendemain, en la fête de la bienheureuse Vierge Marie du Rosaire (mémoire rattachée à la victoire de Lépante remportée par les chrétiens sur les turcs le 7 octobre 1571), eucharistie dans la crypte dite par deux prêtres masqués (!). Nous parvenons enfin à Cluny, terme de notre équipée. Là, nous donnons rendez-vous à nos amis de Broissia qui habitent dans la Bresse, à l’autre bout du département. Joie des retrouvailles ! En matinée, nous visitons les beaux restes de la « major ecclesia » où les archéologues ont eu la surprise cet été de tomber sur des pièces d’or. Un trésor caché par un malade soigné par les religieux. Outre l’accueil des souffrants, la communauté clunisienne était forgée autour de la prière et de la commémoration des morts.
En cette veille de commémoration des morts 2022, le 20 octobre précisément où notre amie Annie Robert est passée sur l’autre rive.
Une question me taraude : pourquoi ne pas nous avoir fait l’honneur et la joie de répondre à notre appel de mai 2012 (renouvelé depuis) et ne pas vous être joints à notre projet de pèlerinage en redonnant vie à la VIA FRANCIGENA (la Voie des Français alias la Route des Francs) ? Cela eut été une aventure extraordinaire dont on parlerait encore !…
Vous en trouverez quelques évocations ici : https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2019/08/31/a-propos-de-la-via-francigena/
En Italie, la Via Francigena est toujours active. Nombres de scouts italiens et de pèlerins internationaux la pratiquent toujours aujourd’hui, pour se rendre et se recueillir à Rome. Les Accords du Latran prévoient en effet une sorte de concordat entre l’Etat italien et l’Eglise Catholique et les oeuvres Chrétiennes ne sont pas encore passibles de tribunaux Outre-Alpes (même si avec François, il faut se demander où on va, surtout avec l’annexion de l’Ordre de Malte, mais je m’égare…).