Euthanasie : l’appel de Louis de Bourbon contre un basculement civilisationnel

TRIBUNE. Pour le duc d’Anjou, chef de la Maison de Bourbon et prétendant légitimiste aux trônes de France et de Navarre, les textes en passe d’être votés à l’Assemblée signent l’abdication de notre société toute entière face à la vulnérabilité, la souffrance et la faiblesse.

Louis de Bourbon, duc d’Anjou

Louis de Bourbon.

Louis de Bourbon. Hans Lucas via AFP / © Bastien Andre

    Au milieu de la fièvre qui agite le personnel politique à propos du projet de loi relatif à la fin de vie, je veux, une fois encore, faire entendre à la France la voix de la tradition politique et de la morale millénaire sur laquelle elle se repose. Cette tradition, je l’assume tout entière en tant que chef de la Maison de Bourbon. Et il m’appartient de veiller à ce qu’elle ne soit pas un reste anecdotique de notre passé, mais bien un guide qui éclaire et conduise nos actes.

      Ce qui se prépare au Parlement constitue une nouvelle rupture anthropologique que je condamne fermement. Je la condamne car à terme, elle nuit à la France et aux Français. En janvier 2024, j’avais déjà exprimé toutes les craintes et les réserves que j’avais à l’égard du texte qui était en préparation.

   Malheureusement, la réalité a dépassé ce que j’imaginais, comme tous les hommes de bien. Les amendements adoptés dans le cadre de la loi signent l’acte d’abdication de notre société toute entière face à la vulnérabilité, la souffrance et la faiblesse. Le dernier clou dans le cercueil de la civilisation européenne, bâtie sur les lumières du christianisme et de l’humanisme, s’apprête à être planté dans une certaine indifférence médiatique et politique.

La rentabilité plutôt que le sacrifice

     Les décideurs politiques ont une lourde responsabilité face à l’humanité tout entière. Et ce n’est pas en maquillant ce suicide assisté qu’ils s’apprêtent à voter sous le masque d’une pseudo-fraternité qu’ils échapperont au tribunal de l’Histoire et de leur conscience. Je voudrais le leur rappeler, afin qu’ils se rendent compte de la gravité de l’acte qu’ils s’apprêtent à poser.

« C’est la Vie et la nature tout entière qui seront rejetées »

Dans un pays marqué par des progrès sociaux importants, par un système de soin extrêmement développé, il est désolant de constater que la lâcheté va être choisie plutôt que le courage, la rentabilité plutôt que le sacrifice. Car ne doutons pas que des logiques comptables abjectes sont à l’œuvre parmi les motivations sous-jacentes. Les personnes les plus fragiles seront priées de comprendre qu’elles sont de trop, qu’elles pèsent un poids trop lourd pour notre économie

   Peu à peu, un certain modèle hygiéniste de société nous est donc proposé dans lequel la faiblesse, l’inattendu, et l’imperfection ne seront plus tolérés. C’est la Vie et la nature tout entière qui seront rejetées. Et là aussi, nous le savons bien, sous couvert d’humanisme et de liberté, cette loi va encore aggraver les inégalités. Alors que les personnes aisées pourront avoir la chance de parvenir aux unités de soins palliatifs, les plus pauvres eux, n’auront que la mort comme alternative à leur souffrance. Un contraste frappant pour la République française qui se veut être la championne de l’égalité.

Les mots ont été vidés de leur sens pour en faciliter l’usage, les valeurs morales ont été évacuées pour faciliter les décisions, les restes de notre civilisation judéo-chrétienne ont été dispersés pour faciliter l’avènement de l’individu-roi. Nous ne raisonnons plus en tant que société, mais en somme d’individus, avec chacun leurs désirs, leurs angoisses, leurs problèmes. Et que le plus fort gagne ! Voilà le nouveau credo de notre société hyper-consumériste.

Refuser ce basculement

      L’héritage monarchique que je porte voudrait convaincre mes compatriotes que d’autres voies sont possibles. Qu’il reste tant à faire pour développer les soins palliatifs, qu’il nous reste tant à apprendre de ces gens qui souffrent, qui ne veulent pas mourir mais auxquels nous ne donnons pas la parole et dont nous refusons d’entendre le témoignage. Cette loi n’est pas qu’une affaire d’individus. Elle est l’affaire de la société française dans toutes ses composantes pour aujourd’hui et pour demain.

    Que voulons-nous pour notre pays ? Pour notre génération et les suivantes ? Et si ceux à qui je m’adresse ne veulent raisonner que de manière égoïste, je veux leur rappeler qu’ils sont les souffrants, les handicapés et les personnes âgées de demain. Peut-être constateront-ils alors que l’appel de la Vie, même dans ces instants les plus vulnérables, reste immense.

« Faisons le choix ne pas peser la valeur des vies humaines et surtout de ne pas acter la fin de notre antique civilisation »

      Enfin, je veux également avoir une parole pour les soignants que l’on feint trop d’ignorer et qui ne sont pas entendus. Eux qui sont totalement dévoués au service des malades et des souffrants, eux qui exercent leur profession avec passion et humanité, eux qui côtoient la vie et la mort chaque jour qui passe. Ne renoncez pas à votre déontologie : elle est votre honneur. Elle est le rempart à la fois mince mais grandiose qui sépare notre civilisation d’une pente glissante, où la vie risquerait de perdre peu à peu sa valeur, et où la compassion se confondrait avec l’abandon.

       Ce rempart, c’est le refus de considérer la vie humaine comme une simple variable d’ajustement, comme un fardeau à soulager par l’effacement. C’est le choix de soigner plutôt que de céder, d’accompagner plutôt que de précipiter. Vous portez, dans l’ombre parfois, une part immense de ce qui fait la dignité de notre société. Soyez fermes dans ce qui fait votre intégrité et votre honneur : les Français vous soutiennent.                               

    J’en appelle aux médecins, aux philosophes, aux croyants et à tous leurs pasteurs, aux responsables associatifs, et à tous ceux qui savent ce que valent la souffrance, le soin et la fragilité. Refusez ce basculement. Et plus largement, ça n’est pas à chaque Français que je m’adresse, mais bien à la France même. Faisons le choix ne pas peser la valeur des vies humaines, de ne pas s’ouvrir à un système de mort et surtout de ne pas acter la fin de notre antique civilisation. En effet, c’est bien elle qui sera la première victime de cette loi. Puisse saint Louis éclairer nos dirigeants et nos décideurs politiques.

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2 thoughts on “Euthanasie : l’appel de Louis de Bourbon contre un basculement civilisationnel

  1. Hervé J. VOLTO

    En théorie, seule l’Assemblée dite nationale l’avoté : le Sénat peut encore s’opposer.

    dansce cas, laoi ne serait pas promulguée.

    Merci au Duc d’Anjou de peser de toute son autorité pour interpeller les Français de bonne volonté.

    Reply

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