Chers lecteurs,
Je vous ai promis hier le second document trouvé au cours du rangement des répertoires et des fichiers de mon ordinateur.
Ce document concerne le docteur Philippe Jean Pelletan, celui-là même qui est venu voir son malade au Temple le 8 juin 1795, qui l’a trouvé mort, et qui a été chargé par la Convention de procéder à son autopsie.
Ce document, je connaissais son existence sur le CRIL 17, et en déplorais sa disparition avec celle du site de Charles Barbanès, mais ne me souvenais plus l’avoir recopié et enregistré sur Word.
C’est un document très important dans l’énigme Louis XVII (malgré l’analyse ADN mitochondriale du cœur, elle reste une énigme non résolue), puisque c’est le témoignage du dernier médecin de l’Enfant du Temple, et en particulier son témoignage concernant l’autopsie qu’il a faite de son corps.
Aussitôt retrouvé, et constatant qu’à l’époque (2011) je n’avais ni noté de source ni de référence, mais seulement un lien vers la photo des pages du livre relatant ce témoignage, ce lien étant obsolète et inopérant, et n’ayant aucune preuve du texte que je possédais, j’ai contacté Christian Crépin qui a collaboré étroitement avec Charles sur les sujets abordés dans cette énigme Louis XVII ainsi que dans l’écriture du livre de ce dernier » Le Cimetière Sainte-Marguerite – Autopsie d’une fausse vérité « (très, très peu d’exemplaires et totalement épuisé).
Pour information, Cristian Crépin est certainement actuellement la personne spécialiste de l’Énigme Louis XVII qui connaît le mieux la question sous tous ses angles, ainsi que toutes les pistes célèbres ou moins répandues, voire nouvelles, où aurait pu passer Louis XVII une fois exfiltré du Temple.
Spécialisé dans la généalogie, il possède des armoires entières de livres plus ou moins rares sur cette affaire, et de documents divers (photo de microfilms, photocopies, etc.)… Il possède environ 300 000 pièces abordant directement ou indirectement le sujet.
Il connaît toutes les thèses et faux dauphins. Il ne retient que les faits et encore les faits !
D’autre part, il possède des cheveux de Louis XVI, et de la duchesse d’Angoulême.
Après ma demande de la source de ce document Pelletan, il m’a retrouvé dans les cinq minutes les références que je recherchais.
La source est donc : La Revue rétrospective du 1er mars 1814 de Paul Cottin, aux pages 146 à 152 (les pages 147 et 148 n’existant pas).
Ce texte (Mémoire rédigé par Pelletan le 1er mai 1814 ) était dans les minutes de Me Tollu notaire à Paris en 1894.
CITATION EN PROVENANCE DU MEMOIRE PELLETAN
Ainsi s’exprime Philippe Jean Pelletan :
« On apercevra aisément que les dénominations données à l’illustre enfant étaient commandées par les circonstances. JE FUS EGALEMENT GÊNÉ PAR L’IMPOSSIBILITÉ DE DIRE que ce que nous découvrions de sa maladie était le résultat nécessaire des mauvais traitements et des peines morales auxquels l’enfant avait été en proie pendant longtemps : IL FALLUT ATTRIBUER les engorgements du ventre et autres A UN VICE SCROFULEUX, ainsi que QUELQUES AUTRES DISPOSITIONS PHYSIQUES QU’IL FALLUT TAIRE, à cause de leur connexion avec les circonstances susdites. Cependant, nous devons à la vérité de certifier n’avoir reconnu aucune trace de mort violente. »
(Note : Les majuscules et le souligné sont de moi-même.)
Ci-après, mon commentaire en 2011 à la lecture de ce passage :
C’est un scoop !
Que veut nous dire Pelletan ?
D’abord, il avoue ici, sans le dire explicitement quoiqu’en le disant tout de même, que dans son procès-verbal d’autopsie, il fait un faux sur le diagnostic de la mort de l’enfant du temple. La dernière phrase le prouve : « A partir de maintenant je dis l’entière vérité, il n’y a aucune trace de mort violente, mais avant… je raconte des histoires pour les petits enfants ! ». Il se refuse ainsi à dénoncer l’attitude et les décisions de la Convention.
Dans la partie principale de son discours il y a 2 sujets distincts : la cause de la maladie et de la mort, et puis… une phrase sibylline sur « quelques autres dispositions qu’il fallut taire ».
Le premier sujet est, là-encore, défini de façon ambiguë. Pelletan veut-il dire que la cause de la maladie et du décès N’EST PAS la tuberculose scrofuleuse, ou bien qu’il met sur son compte des dommages collatéraux ? Je crois personnellement que la teneur et l’esprit de sa phrase indiquent qu’il a dû, par prudence et par peur aussi, diagnostiquer « un vice scrofuleux » pour « ce que nous découvrions de sa maladie » ; or dans une autopsie… on découvre les dommages de la maladie TOUTE ENTIERE !
Alors, la maladie de l’enfant du Temple… tuberculose ou pas ?
Le second sujet est encore plus mystérieux !
Quelles autres dispositions a-t-il dû taire ?
N’est-ce pas, en des termes à la fois diplomatiques, apparemment médicaux et peut-être subliminaux, l’aveu de Pelletan qu’il reconnait, par des caractères physiques, que l’enfant du Temple NE PEUT ÊTRE le Dauphin ?
Si c’est le cas, pourquoi s’acharne-t-il à vouloir faire passer le cœur qu’il possède pour celui du fils de Louis XVI ?
En ces temps si troublés où les têtes volent pour un rien, veut-il protéger sa vie en assurant la Convention et les régimes révolutionnaires successifs de son allégeance par le fait qu’il détient « une preuve scientifique et biologique » de l’identité « officielle » de l’Enfant du Temple ?
En bon révolutionnaire qu’il est, n’applique-t-il pas à la lettre la fameuse phrase de Cambacérès au sujet du Dauphin ?
« Lors même qu’il [Louis XVII] aura cessé d’exister, on le retrouvera partout et cette chimère servira longtemps à nourrir les coupables espérances. »
CAMBACÉRÈS (1753-1824), Discours tenu le 22 janvier 1795, au nom des Comités de salut public, de sûreté générale et de législation, de la Convention.
Phrase prémonitoire, prononcée au deuxième anniversaire de la mort de Louis XVI.
À la tribune, l’orateur conclut contre la mise en liberté de son fils. Le dauphin Louis XVII mourra officiellement au Temple le 8 juin de cette année – mais est-ce bien lui ou un enfant qui aurait pris sa place ? Ce sera l’énigme du Temple, l’un des mystères de l’histoire de France, conforté par cette phrase d’un grand juriste qui pèse toujours ses mots (…)
Chouandecoeur
ANNEXE : La citation de Pelletan est à la page 151 de la source.
Source envoyée par Christian Crépin avec le contexte de la citation :
Les chrétiens n’accordent sans doute pas assez de crédit aux prophéties que Nostradamus a pu établir d’après la Kabbale juive sur la généalogie d’Henri second, probablement son descendant. Il ne dit pas que le Comte de Chambord a su l’existence de son oncle Louis XVII mais en parle en termes assez clairs. Le Comte de Chambord était boiteux suite à un accident de cheval.
Centurie III-73
Quand dans le regne parviendra le boiteux,
Competiteur aura proche bastard:
Luy & le regne viendront si fort roigneux,
Qu’ains qu’il guérisse son faict sera bien tard.
Il est sans doute fondamental, pour ne pas douter de la survie de Louis XVII, de bien comprendre le témoignage du Docteur Pelletan qui laisse penser des choses qui vont dans ce sens.
Que sait Christian Crépin des pistes moins répandues, voire nouvelles? Il serait intéressant de les connaître.
Une, qui n’est pas si nouvelle, découle du livre d’Octave Aubry: « Le roi perdu » (1927) qui dit que le dauphin est mort en 1803, lors d’une révolte de noirs à Saint Domingue. Partant de la même piste qui prend ses origines au château de Vitry-sur-Seine où le Baron de Petitval fut assassiné avec ses proches, Gaston et Myriam de Béarn (« La couronne de silence ») ont dit que le dauphin était Jean-Marie Hervagault mort à Bicêtre en 1812. Du même rapport (contesté) de la séance secrète du Directoire, fin avril 1796; que ces auteurs rapportent, qui aurait eu lieu à cause de ce monstrueux assassinat, il est encore possible d’entrevoir une autre piste tenant compte des déplacements du Baron lors de ses derniers jours. Christian Crépin a t-il entendu parler de « Louis XVII au pays des collines » de Paul d’Hondt (1974). Je n’arrive pas à mettre la main sur ce livre. S’agit-il seulement d’une de ces troublantes inventions dont l’Intelligence Artificielle a le secret? Ou écrit à compte d’auteur, très peu diffusé, n’existe-t-il plus? Il n’ y aurait pas de fumée sans feu… mais il y a eu vraiment beaucoup de fumées…
Merci Jean Deweer pour votre commentaire particulièrement documenté.
Je vais le transmettre à Christian Crépin pour avoir son avis… et puis pourquoi pas, lui demander d’intervenir lui-même souvent sur le blog.
Bien à vous,
Chouandecoeur
Trois médecins seraient morts d’avoir su la substitution, le docteur Pelletan qui leur a immédiatement succédé avait des raisons de se montrer très prudent et de s’exprimer comme il l’a fait.
NDLRB. Ces trois décés de praticiens ne paraissent pas confirmés par la littérature médicale de l’époque.
C’est donc le 8 juin 1795, entre 14 et 15 heures, que « Louis-Charles Capet » décède, à l’âge de 10 ans et 2 mois. Le lendemain, Pelletan, Dumangin, Lassus et Jeanroy procèdent à l’autopsie Pelletan, successeur de Desault au chevet du jeune prisonnier depuis le 5 juin 1795, avait fait demander, le 7 juin, Dumangin comme consultant. Requis pour déterminer les causes du décès, chacun fit appel à un confrère de son choix. Dumangin choisit Jeanroy et Pelletan, Lassus.
Ces quatre praticiens jouissent alors d’une réputation bien établie . Philippe-Jean Pelletan vient de succéder également à Desault comme chirurgien-chef du Grand Hospice de l’Humanité (Hôtel-Dieu). Né à Paris en 1747, reçu maître-chirurgien en 1775, il avait été nommé professeur d’anatomie en 1789. En 1794, il occupe la chaire de clinique chirurgicale, à partir de 1815, celle de médecine opératoire et, en 1818, celle des accouchements. Membre de l’Institut de France, professeur honoraire en 1823, il meurt six ans plus tard, à Bourg-la-Reine, à l’âge de 83 ans.
Jean-Baptiste-Eugénie Dumangin est médecin-chef de l’hôpital de l’Unité (La Charité). Né à Château-Thierry en 1744, reçu docteur régent en 1768, rédacteur du Journal de médecine, de chirurgie et de pharmacie depuis 1776, il avait été nommé, en 1780, professeur de pharmacie à la faculté de Médecine. Il meurt en 1829, à Saint-Prix près de Montmorency, à l’âge de 82 ans.
Nicolas Jeanroy, né à Tulle en 1732, fut reçu docteur régent en 1758. Nous le savons professeur de chirurgie à Paris dix ans plus tard et bibliothécaire de la faculté en 1777. Professeur honoraire au moment de l’autopsie, nous perdons ensuite sa trace.
Fils de chirurgien, Pierre Lassus, né à Paris en 1741, reçoit sa maîtrise en 1765. Chirurgien des filles de Louis XV à partir de 1770, il devient neuf ans plus tard lieutenant du premier chirurgien du roi, puis, en 1791, professeur de pratique chirurgicale. En 1794, il enseigne la médecine légale et l’histoire de la médecine à l’Ecole de santé de Paris. Membre de l’Institut de France, il termine sa carrière comme chirurgien consultant de Napoléon Ier et meurt en 1807.
https://cour-de-france.fr/vie-quotidienne/medecine-sciences-et-savoirs/etudes-modernes/article/pathographie-de-louis-xvii-au-temple-aout-1792-juin-1795#:~:text=Le%20lendemain%2C%20Pelletan%2C%20Dumangin%2C,7%20juin%2C%20Dumangin%20comme%20consultant.
Il y aurait donc eu fable. Qui l’a inventée?