Emmanuel Macron . Aprés la mort du roi, la mort de la nation ?

Par Jean-Paul Brighelli

Excellent Brighelli ! Comment ne pas reprendre ici cette chronique si bien venue, écrite au sortir des résultats du premier tour de l’exécrable présidentielle, parue sur Bonnet d’âne le lendemain 24 avril et sur Causeur mardi 25. Chronique, comme toujours lucide, à la tonalité sombre, pessimiste – il y a de quoi ! -, un rien dandy, tout de même, un tantinet désengagée aussi, et, comme, face au néant proprement dit, une sorte de réaction de survie … . Mais nous ne croyons guère à la pérennité de ce genre de désengagement, Brighelli, comme nous, n’étant pas de la race des indifférents. Et puis la référence aux impacts de la Révolution française sur la vie politique de notre aujourd’hui et la sentence qui suit : « Le peuple qui avait guillotiné son roi pour élire la nation vient de guillotiner la nation » ne sont pas pour nous déplaire. Non, bien-sûr, nous ne chercherons pas à annexer Brighelli, mission impossible, mais, simplement, nous rappellerons le vieil adage d’esprit judéochrétien : « Vous aurez les conséquences ».  

LFAR- La Faute à Rousseau.

Et pendant que Jim Morrison chante « la fin », la jungle s’embrase dans la mémoire du capitaine Willard…

Cette fois, c’en est bien fini, et Zhu Enlai, qui dans les années 1960 pensait qu’il était trop tôt pour se prononcer sur les impacts de la Révolution française, regarderait avec son sourire chinois le résultat des élections françaises. Les députés qui s’étaient regroupés par affinités à droite et à gauche n’ont plus droite ni gauche. Le peuple qui avait guillotiné son roi pour élire la nation vient de guillotiner la nation.

Pas tout le peuple : la carte électorale française, ce matin, coupe le pays en deux, entre un ouest macronien (plus les deux enclaves hors sol de Paris et Lyon) et le reste du territoire qui a mis Le Pen en tête. Si le second tour est plié, le troisième — les Législatives — reste ouvert, au moins en apparence. Et derrière, une France divisée en deux en diagonale, du Havre à Perpignan.

Je salue Jean-Luc Mélenchon, le seul à ne pas se croire propriétaire des voix qui se sont portées sur lui. Les autres ont ostensiblement le « sursaut républicain » au moment même où la république se dilue. Où la culture française disparaît. C’est que dans la future coalition, les places seront chères.

Je salue aussi Benoît Hamon, cocu des pieds à la tête, empapaouté par Hollande, qui avait besoin de lui pour cristalliser la gauche de gauche, afin que Mélenchon ne soit pas au second tour. Propulsé au casse-pipe pendant que les socialistes « raisonnables », à commencer par le chef de l’Etat, choisissaient Macron… Il y aura de l’ambiance aujourd’hui rue de Solférino. Je sens que mon ami Gérard va fulminer.

Je salue aussi certains amis qui votèrent avec enthousiasme pour Dupont-Aignan : sans doute sont-ils heureux de voir porté au pouvoir (allez, il n’y a aucun suspense) le candidat le plus européaniste, le plus mondialiste, le moins patriote… Et sans même que leur champion atteigne les 5% fatals qui lui auraient permis de rentrer dans ses fonds ! Carton plein.

Que restera-t-il de l’Ecole de la République dans 5 ans ? Poser la question, c’est y répondre. Et dans 10 ans ? Macron est là pour longtemps, inventé par les sondages, soutenu par les médias et par les grands argentiers qui l’ont propulsé au premier rang avec son joli sourire de télévangéliste…

Il y avait la tentation de Venise — un joli titre pour un livre écrit par Alain Juppé en 1993. J’ai aujourd’hui la tentation de Candide — partir cultiver mon jardin, faire de la littérature — je sors un polar très noir dans un mois —, me consacrer à mes élèves (et j’avoue que l’idée de prendre ma retraite m’a saisi hier soir) tant qu’il reste des élèves auxquels on peut expliquer qu’il existe une culture française, contrairement à ce qu’affirme le futur président : certaines pages écrites pendant la campagne sur ces déclarations significatives entreront dans le gros livre sur la langue française que je sortirai en septembre, tant que nous parlons français, et pas globish — ça ne saurait tarder.

Il nous reste à regarder les décombres, assis sur une terrasse, un verre à la main.

En feuilletant un bon livre ou les cuisses d’une créature.

Notez que les années à venir s’annoncent fécondes pour un polémiste — il y en aura, des choses à fustiger. Mais pour rien, et à vide.

Oui, la tentation d’un bon vin, devant un paysage choisi, avec quelques amis. Pendant que la jungle s’embrase. 

Jean-Paul Brighelli

Enseignant et essayiste, anime le blog « Bonnet d’âne » hébergé par Causeur.

http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2017/04/26/choisir-macron-c-est-guillotiner-la-nation-this-is-the-end-5937138.html

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