Pâques 2020 : le retrait de la gloire de Dieu

Pâques 2020 : le retrait de la gloire de Dieu

Rédigé par Abbé Henri Vallançon, Bibliste le  dans Religion

Pâques 2020 : le retrait de la gloire de Dieu

    

       Dans le malheur qui frappe actuellement notre monde, avec cette épidémie, nombre d’hommes d’Église ont tenté, ici ou là, des interprétations de la situation présente. Il est troublant de ne trouver presque jamais, venant de clercs, une tentative d’éclairage spécifiquement religieux de cette crise. Leurs propos dénoncent : le « système » dans lequel nous vivons, la difficulté à prendre conscience que les ressources ne sont pas illimitées, la course folle et trop rapide de notre monde, la machine financière, la crise écologique, l’égoïsme, l’individualisme, la recherche du profit, le consumérisme outrancier, le manque de solidarité, l’avidité du gain, les guerres et les injustices, le cri des pauvres et de notre planète gravement malade… Pour être sans doute réelles, ces causes invoquées ne visent que des facteurs socio-économiques. Venant d’hommes d’Église, détachés de responsabilités temporelles pour se consacrer aux choses de Dieu, cela ne revient-il pas à battre la coulpe des autres, sans faire retour sur soi et voir si notre propre responsabilité spirituelle de clercs n’est pas aussi concernée ? Ne nous exonérons-nous pas de l’effort que nous réclamons du monde ? Ne faudrait-il pas chercher dans l’épidémie actuelle un message de Dieu pour son Église ?

L’inouï de cette crise

Le coronavirus Covid-19 est à la fois très contagieux et faiblement mortel (la courbe de mortalité dans les pays atteints augmente à peine, si on la compare aux années antérieures à la même époque de l’année : il meurt habituellement 17 millions de personnes de maladie infectieuse par an dans le monde). Mais il interrompt le culte public de l’Église. N’est-ce pas là l’inouï de cette crise ? Personne ne conteste le bien-fondé de l’interdiction actuelle des rassemblements pour limiter la propagation du virus. Il faut bien faire tout ce qu’il est possible pour l’enrayer et les assemblées de fidèles dans les églises ne sont pas raisonnables à ce moment. Pas de messe publique à Saint-Jean-de-Latran, à Saint-Pierre de Rome, ni au Saint-Sépulcre à Jérusalem dans aucun des rites liturgiques – et Dieu sait qu’elles sont suivies par une foule dense –, ni dans la quasi-totalité des cathédrales et églises du monde. Quel événement spirituel majeur ! En deux-mille ans d’histoire de l’Église, cela n’est jamais arrivé. Au pire des persécutions, on célébrait dans les maisons. Là, non. Il faut remonter à la grande crise des années 167-164 avant Jésus-Christ, dont parle le livre de Daniel et les livres des Macchabées, pour trouver le dernier épisode de l’interruption du culte public de Dieu dans son peuple.

   Dans cette situation extrême, même les courants du christianisme les plus strictement attachés à l’observance de la loi de Dieu ne se distinguent plus des autres : les communautés catholiques traditionalistes ont aussitôt emboité le pas à la Conférence des évêques de France, sans mot dire ; le Saint-Synode permanent de l’Église orthodoxe de Grèce avait commencé par déclarer que la communion eucharistique n’était pas le danger mais le remède, avant de revenir huit jours plus tard sur ses déclarations, invitant chacun à rester chez soi. Tous ont fini par s’y résoudre : le culte public de l’Église est suspendu. Comment ne pas penser qu’il y a là un message que Dieu nous adresse ? Comment ne pas souligner en plus que cette suspension du culte public de l’Église a lieu précisément en cette période liturgique-là : la célébration du mystère pascal ?

Retourner à la Parole de Dieu

  Rien ne vaut, pour le chrétien, face aux événements troublants, que de retourner à la Parole de Dieu, aux Saintes Écritures. Au mois de septembre 592 avant Jésus-Christ, Ézéchiel, le prêtre-prophète, fut transporté en vision, depuis Babylone où il était déjà en exil, au temple de Jérusalem :

« L’Esprit m’enleva entre la terre et le ciel, et me transporta dans des visions divines à Jérusalem, à l’entrée de la porte intérieure, du côté du nord, où était l’idole de la jalousie, qui excite la jalousie du Seigneur » (Ez 8,3). « Et il me dit : Fils de l’homme, vois-tu ce qu’ils font, les grandes abominations que commet ici la maison d’Israël, pour que je m’éloigne de mon sanctuaire ? Mais tu verras encore d’autres grandes abominations » (Ez 8,6). « Je regardai et voici, il y avait toutes sortes de figures de reptiles et de bêtes abominables, et toutes les idoles de la maison d’Israël, dessinées tout autour sur le mur. Soixante-dix hommes des anciens de la maison d’Israël, au milieu desquels était Jaazania, fils de Shaphan, se tenaient devant ces idoles, chacun l’encensoir à la main, et il s’élevait une épaisse nuée d’encens. Et il me dit : As-tu vu, fils d’homme, ce que font les anciens de la maison d’Israël, dans l’obscurité, chacun dans les chambres consacrées à son idole ? Car ils disent : le Seigneur ne nous voit pas, le Seigneur a abandonné le pays. Et il me dit : Tu verras encore d’autres grandes abominations qu’ils commettent (…). Et voici, il y avait là des femmes assises, qui pleuraient Thammuz. Et il me dit : Vois-tu, fils de l’homme ? Tu verras encore d’autres abominations plus grandes que celles-là. Et il me conduisit dans le parvis intérieur de la maison du Seigneur. Et voici, à l’entrée du temple du Seigneur, entre le portique et l’autel, il y avait environ vingt-cinq hommes, tournant le dos au temple du Seigneur et le visage vers l’orient ; et ils se prosternaient à l’orient devant le soleil » (8,10-16).

Cette vision décrit quatre formes de pratique idolâtrique commises à Jérusalem, de plus en plus proches du sanctuaire de la présence de Dieu. La suite de la vision montre la gloire du Seigneur quitter son temple ainsi profané (Ez 9,3 ; 10,4.18-19) et la ville de Jérusalem tout entière (Ez 11,22-23). L’analogie entre la gloire de Dieu quittant son sanctuaire, son temple et sa ville en Ézéchiel, et la suspension du culte public de l’Église du Christ aujourd’hui, au sommet de l’année liturgique, est particulièrement frappante. Cette terrible crise sanitaire mondiale ressemble bien quand même à un avertissement divin expresse pour les hommes d’Église, et en particulier pour la hiérarchie ecclésiastique...

Face au relativisme doctrinal

    Les descriptions bibliques de cérémonies cultuelles idolâtriques ne seraient-elles qu’un motif pittoresque de l’ancien Israël, une aimable fable destinée à divertir le lecteur ? Même si c’est avec des raisons plus sophistiquées que les Hébreux d’autrefois, n’avons-nous pas vu reparaître au contraire en notre temps, de telles offenses abominables au premier commandement du Décalogue, « qui excitent la jalousie du Seigneur » ? Le relativisme doctrinal sévissant à tous les niveaux de la vie de l’Église, une vision naïve des éléments de vérité contenus dans les autres religions, ont ébranlé les affirmations les plus nettes des apôtres :

« Jésus : il n’y a de salut en aucun autre, car il n’y a sous le ciel aucun autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés » (saint Pierre en Ac 4,12) ; « il y a un seul Dieu et un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme » (saint Paul en 1 Tm 2,5).

    À mesure que la culture de nos sociétés occidentales s’éloigne de la foi chrétienne, nous observons une tendance exponentielle à transformer périodiquement les sanctuaires de la présence de Dieu que sont nos cathédrales, nos églises, en scènes de concerts indécents ou profanatoires. Que de musiques indignes de la maison de Dieu, étrangères à la liturgie catholique, aux paroles souvent blasphématoires si on les traduit de l’anglais, diffuse-t-on sans vergogne lors des baptêmes, mariages, inhumations… Il est devenu banal, et même louable, de célébrer l’office des funérailles pour des pécheurs publics, en contradiction avec le Code de Droit Canonique (§ 1184), rendant ainsi dérisoires les rites de l’Église. La profanation des sacrements a pris des proportions jamais atteintes. Le manque de respect vis-à-vis de l’eucharistie, la banalisation des gestes du clergé et des fidèles pour en disposer, la disparition dans la plupart des communautés chrétiennes de l’agenouillement et des génuflexions sont généralisés. Nous, hommes d’Église, avons-nous le souci aigu, jusqu’au tourment, que, par respect pour l’honneur dû à Dieu et aux choses de Dieu, les sacrements soient reçus en état de grâce ? Ce principe est radicalement ébranlé aujourd’hui dans l’Église et partout bafoué : combien communient sans se confesser une fois l’an ? Combien de mariages célèbre-t-on, combien d’onctions des malades sont données à des personnes sans confession préalable ?

Le chemin de l’espérance

    À Pâques 2020, la gloire de Dieu, lassée d’être autant méprisée, se retire. Elle se dérobe à nos offices, elle se refuse à notre ministère.

    Mais la Parole de Dieu continue à nous indiquer le chemin de l’espérance par la conversion. Ainsi, à la fin du livre d’Ézéchiel, le prophète décrit sa vision du retour de la gloire de Dieu dans le Temple (Ez 43,1-12), puis du renouveau du culte, de la vie du peuple de Dieu. Cet oracle, que nous lisons chaque année à la veillée pascale, forme la charnière entre le retrait et le retour de la gloire du Dieu et donne la clé de compréhension de son action dans l’histoire :

« J’ai voulu sauver l’honneur de mon saint nom, que profanait la maison d’Israël parmi les nations où elle est allée. C’est pourquoi, dis à la maison d’Israël : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Ce n’est pas à cause de vous que j’agis de la sorte, maison d’Israël ; c’est à cause de mon saint nom, que vous avez profané parmi les nations où vous êtes allés. Je sanctifierai mon grand nom, qui a été profané parmi les nations, que vous avez profané au milieu d’elles. Et les nations sauront que je suis le Seigneur, dit le Seigneur Dieu, quand je serai sanctifié par vous sous leurs yeux. Je vous prendrai d’entre les nations, je vous rassemblerai de tous les pays, et je vous ramènerai dans votre pays. Je répandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiés ; je vous purifierai de toutes vos souillures et de toutes vos idoles. Je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai en vous un esprit nouveau ; j’ôterai de votre corps le cœur de pierre, et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon Esprit en vous, et je ferai en sorte que vous suiviez mes ordonnances, et que vous observiez et pratiquiez mes lois » (Ez 36,21-27).

Abbé Henri Vallançon, Bibliste

https://www.hommenouveau.fr/3143/religion/paques-2020—le-retrait-de-la-gloire-de-dieu.htm

(Les intertitres sont de la rédaction).

0 thoughts on “Pâques 2020 : le retrait de la gloire de Dieu

  1. Agnès Lacour

    Magnifique ! je ne trouve pas d’autres mots pour exprimer cette réalité mise au grand jour .Cela devrait être diffusé à une très grande échelle . J’en ai vu des choses qui m’ont choquée à Lourdes pendant les 2 années où j y ai vécu ! au point que je ne pouvais plus aller à la messe au sanctuaire . Heureusement j’ai trouvé ailleurs la messe de toujours
    Loué soit le Seigneur , il a fait des merveilles pour moi

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  2. Hervé J. VOLTO

    Je vous souhaite à Ala in TEXIER et tous les amis Fontevraistes de Bonnes et Saintes Fêtes de Pâques dans la lumière des Coeurs Unis de Jésus-Christ résusucité !

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    1. Louis Chiren

      LA MAIN DE JUSTICE

      Cette œuvre est née les 12 et 13 avril 2020. Nous fêtions le dimanche et le lundi de Pâques. Cette année 2020 est à ce titre exceptionnelle car nous étions empêchés de participer aux fêtes liturgiques dans nos églises respectives. L’Évangile selon saint Luc de ce lundi de Pâques est on ne peut mieux approprié puisqu’il nous présente cette scène.

      Luc 24,13-35
      ” En ce temps-là, ce même jour de la résurrection deux disciples de Jésus se rendaient à une bourgade nommé Emmaüs, distante de Jérusalem de soixante stades ; et ils causaient entre eux de tous ces événements. Tandis qu’ils causaient et discutaient, Jésus lui-même, s’étant approché, se mit à faire route avec eux ; mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.”

      Ainsi nous savons bien que le Christ est parmi nous mais le fait de ne pas pouvoir l’approcher à la sainte table nous laisse comme orphelin. Ce sacrifice spirituel dans cette épreuve où des âmes rejoignent leur dernière demeure est comme le pensent quelques prêtres le signe que nous devons redoubler d’amour et d’abandon à la volonté divine.

      Nous vivons un temps historique car de grandes épidémies se sont déjà manifestées sur nos terres mais aucunes n’a eu un tel impacte jusqu’à limiter le siège de saint Pierre réduit tout comme nous à des interdits ayant pour conséquence de bloquer l’action religieuse.

      Le 25 janvier 2016 au matin, les habitants de l’île de Madère assistèrent à une vision dans le ciel pour le moins étonnante. Un nuage prenant la forme d’une main enflammée très réaliste fut rapidement baptisée “la main de Dieu”.

      Bien entendu que ce soit des phénomènes naturels spectaculaires ou un virus qui n’a pas fini de montrer ses faces cachées, ce monde refusera d’y voir la marque d’un châtiment ou d’un message céleste.

      Rappelons à ce propos que les attaques démoniaques peuvent être des épreuves permises par Dieu qui visent à convertir les âmes.

      Revenons à cette île de Madère qui comme vous le savez appartient au Portugal. Ce pays très catholique eut l’insigne grâce de recevoir les apparitions de Fatima comportant un message au monde.

      Cette main de Dieu n’était-elle pas le signe que de grands bouleversements étaient en cours et qu’il fallait se convertir ? Elle se manifesta le 25 janvier 2016, en août 2016 l’île de Madère était en feu, la France et une partie du monde ne seraient pas épargnées cette année-là ainsi que les suivantes.

      Madère possède la chapelle Notre Dame de Fatima à Sao Vicente construite en 1948 peu après la seconde guerre mondiale. Elle est un lieu de pèlerinage important.

      La famille impériale des Habsbourg aimait se rendre à Madère tel que l’archiduc Maximilien. Sa belle-fille Élisabeth (plus connue sous le nom de Sissi) devenue impératrice s’y rendra de nombreuses fois. Son époux François-Joseph 1er était le petit-fils de François 1er d’Autriche, neveu de Marie-Antoinette notre reine martyre.

      Comment interpréter dans ces méandres de l’histoire le dessein divin, que penser de toutes ces connexions dans les circonstances qui affectent le monde entier.

      À chacun d’y voir ce qu’il souhaite, pour ma part un incident personnel m’a amené à concevoir cette main de justice qui était un signe du pouvoir royal, présente dans les regalia depuis le XIIIème siècle et remise au roi lors de la cérémonie du sacre.

      La tradition lui attribuait aussi une dimension religieuse, chaque doigt de cette main avait une signification précise.

      Le pouce représentait le roi, l’index la raison, le majeur la charité, l’annulaire et l’auriculaire la foi catholique. Les trois doigts ouverts symbolisaient également la Très Sainte Trinité.

      Sur cette illustration peinte, la base du pouce est coupée en souvenir de Louis XVI notre roi martyr, quelques gouttes de sang coulent rappelant son sacrifice qui nous vaudra le salut du royaume ressuscité. Cette coupure nous renvoie à la plaie du Sacré-Cœur de Jésus qui peut tout ayant toujours protégé sa fille aînée dans les plus noirs moments de son histoire.

      Un médaillon présente le profil du petit roi Louis XVII, l’enfant du Temple au destin mystérieux, héritier des rois qui firent la France et qui pourrait bien par cette main de justice, indiquer la main de Dieu qui triomphera à l’issus de ce chemin de Croix.

      https://louischiren6.wixsite.com/peintreetpoete/la-main-de-justice

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